dimanche 24 janvier 2016

Un Lancinant Désir.





Même désir qui, lui du moins, ne vieillit pas,
Une quête au travers du temps qui fut sans trêve,
Le jour où je partis nul ne me rattrapa ;
Pas de sort assuré, pas d’aventure brève,
Une scène changeante et le cœur d’autrefois,
Noblesse oblige à qui le veut, telle est l’enfance :
Un roman d’espérance et d’amour et de foi.
Ô sévère Chronos, qui me fera défense
De le poursuivre encore au plus loin des toujours ?
Je vis de certitude et non pas de « peut-être »
Et rien n’est assez long pour ce désir si lourd,
Un désir, ô vieillard, dont tu n’es pas le maître !
Il me ressemble enfant et comme il est, je suis,
Parce qu’il est j’existe et persiste et demeure,
Nul ne saura jamais qui des deux mène ou suit,
Ni s’il faudra qu’un jour, l’un comme l’autre meure.
Beaucoup l’ont affirmé mais moi je n’en crois rien
Car j’ai pour le prouver la chanson des nuages,
La caresse du vent, quatre odes de saison,
La rivière argentine et l’écho sans partage
Et l’amour proche aimé de toute déraison !
           
                            ***

Un Frisson.






J’ai froid d’être ce que je suis :
Une ombre – à quelle ressemblance ? –
Qui naît et retourne à la nuit ;
J’ai froid d’être ce que je suis.

Poussière aussi qu’une autre suit,
Une pensée, un pas de danse,
J’ai froid d’être ce que je suis :
Une ombre – à quelle ressemblance ? –

                        ***                                          

mercredi 13 janvier 2016

Quête.






Mon pas se fait moins leste,
Chaque heure rétrécit,
Mon territoire aussi
Et tout ce qui me reste
Ne vaut presque plus rien
Lorsque je le compare
A ce que j’aimais bien ;
Les souvenirs m’égarent.
Mes désirs sont aux jours
Ce qu’aux jours sont les rêves :
L’or d’un sable qui court
D’une course trop brève
Que le vide soudain
Sans rémission arrête
Et j’en compte les grains
Comme le mendiant quête…

                        ***      

jeudi 7 janvier 2016

Venez !





Venez à moi, buissons, taillis, forêts,
Venez à moi, prairies, champs et guérets
Et vous, étangs, fleuves, ruisseaux,  rivières,
Mers et brouillards, océans de lumière,
Sentiers perdus, chemins des horizons,
Et vous les vents et les quatre saisons,
Venez au nom de l’immuable écho
De la mémoire et du souffle des mots.

                               ***                                     

jeudi 31 décembre 2015

Chanson du Bout de l'An.



D’un pas pressé ou d’un pas lent
Nous arrivons au bout de l’an
Où le même espoir nous emmène,
D’un pas pressé ou d’un pas lent
Les jours s’en vont en longue chaîne,
Ils sont de douceur ou de peine
Et quelques-uns d’amour violent ;
Nous nous en souvenons à peine
En arrivant au bout de l’an.

Un peu paillasse sur la scène,
Je ne sais trop quoi autrement,
De peu de joie en grande gêne
Il faut bien vivre et le voulant
Pourtant (volonté vaine)
Que de regrets et tellement
Qu’on s’en étonne. Aussi comprenne
Qui le pourra. Moi, je me mens.

Que le flot commun vous entraîne,
Le même temps coule en nos veines,
Qui s’en soucie énormément ?
Chacun sa coupe vide ou pleine:
D’un pas pressé ou d’un pas lent
Nous arrivons au bout de l’an.

                   ***

samedi 5 décembre 2015

Ma République de Papier.






Grandes pièces d’ombres empreintes
D’un univers en demi-teintes
Que j’ai nommé sans sourciller :
Ma République de Papier,
Papier des pages qui font vivre
Mes mots et papier de mes livres,
L’étagère suit le rayon
Et chaque jour est un brouillon.
Je vis un peu dans la poussière
Mais le matin, dans la lumière,
Elle danse sans s’arrêter
Bien au-delà des jours d’été.
Je vis un peu hors des coutumes
Des mœurs et des passions qu’allument
Les grandes affaires du temps
Mais, voyez-vous, je vis content.

                  ***
 

vendredi 4 décembre 2015

La Sentinelle.






L’extrême fin d’après-midi,
L’hiver s’habille d’or fané
Dont le faible éclat se dédit
Au pied des ombres quand, peiné,
Le jour trop court cède la place
Au cerne bleu du crépuscule.
Passants, dites-moi qui vous chasse ?
Dites-moi ce qui vous accule
A rentrer si vite chez vous ?
Du froid, de l’ombre ou du repas,
(Mais peut-être n’est-ce pas tout)
Lequel hâte le plus vos pas ?
Je me dis quand je vous regarde
Qu’on doit quelque part vous attendre ;
Tant mieux pour vous, moi je ne garde
Au cœur aucun souvenir tendre.
L’attendriez-vous d’un soldat,
D’un mercenaire dont l’emploi
Est de veiller sans autre état
D’âme que cette unique loi ?

                    ***