jeudi 18 avril 2019

La chanson du mendiant.




Dans le ciel au crépuscule
La lune pleine est d’argent ;
Je ne suis pas son émule,
Tôt levé, plus qu’indigent.

Dans le ciel qui s’épure
Les oiseaux chantent la nuit,
J’ai deux trous à mes chaussures
Et le hasard me conduit.

D’espérance en espérance
Il ne reste que la faim,
Au sans-toit toujours l’errance,
L’errance jusqu’à la fin.

Bonnes gens faites l’aumône
A celui qui tend la main,
Bienheureux celui qui donne
Tant il gagnera demain.

Voici que la nuit venue
Chacun retourne au logis ;
Le mien se nomme la rue
Et l’encoignure où l’on gît.

Accrochée aux cheminées
La lune est un louis d’or
Dont la poussière arrachée
Me fait rêver où je dors.

                               ***        

Le pont d'argent.




Il est sur la rivière
Un joli pont d’argent
Qui brille à la lumière
D’un soleil de printemps.

L’une des rives est d’ombre,
L’autre de blés aux champs,
L’une a des chemins sombres,
L’autre les a riants.

L’une vit de silence,
L’autre est pleine de chants,
L’une vit d’abstinence
Et l’autre en dépensant.

L’une a le ciel sévère
Et l’autre l’a charmant ;
Voyez ce qu’il faut faire
Pour aimer son comptant :

Il est sur la rivière
Un joli pont d’argent.

                               ***

lundi 8 avril 2019

Vivre petitement ?





Qui donc a dit : « vivre petitement » ?
Villon[1], Verlaine m’ont fait vivre au large,
Machaut et Rutebeuf,
Et Pierre de Marbeuf,
Marot de son prénom Clément,
Ronsard et du Bellay bien au-delà des marges,
Vous ne savez comment !
Et le pauvre Nerval,
Villiers de l’Isle-Adam,
Malherbe autant que Saint-Amant,
Jusqu’à des inconnus comme Leval…
Dois-je continuer, à perdre haleine,
A vous égrener d’autres noms ?
Je n’en prendrai guère la peine :
« Petitement » ? Oh, certes non !

                               ***       


[1] François VILLON (1431-après 1463), Paul VERLAINE (1844-1896), Guillaume de MACHAUT (vers 1300-1377), RUTEBEUF (vers 1230-vers1285), Pierre de MARBEUF (1596-1645), Clément MAROT (1496-1544), Pierre de RONSARD (1524-1585) Joachim du BELLAY (1522-1560), Gérard de NERVAL (1808-1855), Auguste Villiers de l’Isle-Adam (1838-1889), François de MALHERBE (1555-1628), Marc-Antoine GIRARD de SAINT-AMANT (1594-1661), Roger DE LEVAL (1906-1936) tous, bien sûr, des poètes.