mardi 30 octobre 2018

A consommer avec modération - Fantaisie.




Comme une chanson feu-follet
Qui parcourt une nuit obscure,
Deux ou trois vers ni beaux, ni laids,
Se déclamaient d’une voix pure
Dedans le noir le plus complet.

Peut-être était-ce de l’Horace
Ou du Virgile, je ne sais,
Ou quelque épigramme salace
Comme on en fit avec succès
En d’autres temps, en d’autres places.

Chaque rime bringuebalait
Ou boitillait, entre autres choses,
Au hasard vague de couplets
Tels qu’un poète les compose
Pour une chanson feu-follet.

Un poète dont je suppose
Qu’il ne buvait pas que du lait…

                               ***        

Novembre.




Le vent qui souffle de Novembre
Chasse devant lui la saison,
Le froid, les neiges de Décembre,
Le rêve d’un autre horizon.

Les feuilles volent et s’en vont,
Les jardins, les bois s’éclaircissent,
Le ciel achève la moisson
D’un automne en fin d’exercice.

Novembre court et tourne en rond,
Il vient gémir dans les charpentes
Et cogne aux fenêtres du front
Des soupiraux jusqu’aux soupentes.

Novembre court et s’époumone,
Aux jardins il vient effeuiller
Les dernières roses d’automne
Qui pouvaient le faire oublier.

Mais quelque chose l’accompagne,
En contre-point, à demi-mots,
Lointain comme un refrain qui gagne :
La promesse du renouveau.

                               ***       

Mots et chameaux - Satire.




Si les mots ne sont rien, du moins les mots des hommes,
C’est, j’en suis bien certain, qu’ils sont ce que nous sommes
Et quoi de plus normal tout l’ensemble arrivant
D’une motte de terre et d’un souffle de vent ?

Oui, tout commence ainsi, tout vient de ce mélange.
Ce souffle avec nos mots devient un courant d’air
Et le terreau se met, quel phénomène étrange,
A gonfler à tel point qu’il se croit Jupiter.

Imaginez la scène : autant il est de mottes
En ce monde étonnant, autant on a de dieux,
En jupes, en pourpoints, en pantoufles, en bottes,
Impénitents bavards, jaloux et orgueilleux,

Qui vivent au milieu de leurs flots de paroles,
Sans cesse mâchonnant comme font les chameaux
Et comme eux promenant une bosse en symbole,
Le front haut des penseurs qui se prennent au mot.

                               ***