lundi 7 décembre 2020

Un sonnet du Canzoniere de Pétrarque (1304-1374) - Adaptation.

 

 


La nature et le ciel ont du se disputer

Pour vous offrir leurs dons, vous rendant si parfaite

Que le soleil se plaît, vous voyant ainsi faite,

A se croire avec vous en proche parenté.

 

Ils vous ont tant donné, c’était leur volonté,

Qu’il n’est d’homme ici-bas qui sur ces entrefaites         

Ne retrouve à l’instant son âme stupéfaite

Prise aux rets de vos yeux et de votre beauté.

 

Pourtant cette passion que vos charmes inspirent          

Demeure un sentiment dont nul ne peut médire

Tant elle est sans espoir si ce n’est sans regret.

 

Le monde n’a pas vu depuis son premier âge

D’autre beauté que vous obtenir en effet

Qu’une flamme d’amour fut si pure et si sage.

 

                               ***       

 

Sachez entendre.

 

 

Si l’amour n’en fait qu’à sa tête,

A faire l’ange on fait la bête ;

Sachant comment finit la fête

Qu’elle soit aperte ou secrète,

Quand on est sage qu’on s’apprête

A la quitter : sot qui s’entête !

 

Je sais, je dis, sachez entendre,

Prenez ce qui se pourra prendre,

Après la flamme vient la cendre.

 

Profitez des beaux jours d’été,

Fruits de jeunesse et de beauté,

Libres dons de  prospérité,

Souvenez-vous qu’ils sont comptés

Et qu’on ne peut les arrêter

Ou bien les mettre de côté.

 

Je sais, je dis, sachez entendre,

Prenez ce qui se pourra prendre,

Après la flamme vient la cendre.

 

Qu’il vienne un premier jour d’automne,

J’en vois bien trop qui s’en étonnent,

Ce temps promet plus qu’il ne donne.

Dites-moi pourquoi je raisonne,

Pourquoi j’avertis et sermonne

Puisque à la fin le temps ordonne ?

 

Je sais, je dis, sachez entendre,

Prenez ce qui se pourra prendre,

Après la flamme vient la cendre.

 

                               ***


 

samedi 28 novembre 2020

Hôtel de la Vie-Avant.

 

 


Ils traversent tous les matins

En arpentant leurs habitudes,

Ils n’ont pas changé d’attitude,

Leur regard n’est pas plus éteint.

Trouvent-ils que la vie est belle

Tant que l’on peut dire : « moi, je » ?

Liberté de polichinelles

Qu’on manipule comme on veut.

 

L’automne suit ses feuilles mortes,

Ses nuages suivent le vent,

A l’hôtel de la Vie-Avant

Était une serveuse accorte

Le pain doré de nos moissons

Et le vin des belles années ;

Eux mangeront un pain de son

Dans leurs vignes abandonnées.

 

C’est ainsi que passe le temps,

C’est ainsi que changent les choses ;

Que l’on soit le chêne ou la rose

On ne choisit pas son moment.

 

                               ***