lundi 7 mars 2016

Leçon D'Amour.






Il n’y aura jamais d’amour
Que celui qu’on veut bien, ma mie ;
Au pire où le désir accourt,
Au mieux où se tisse la vie.

Tout le reste est fumisterie,
Tout le reste est rodomontade,
Songe, illusion, plaisanterie,
Mirage, broutille ou passade.

Et quant à la compréhension,
Il n’y en aura jamais guère
Plus qu’il n’en faut pour la passion :
Ce n’est pas plus que pour la guerre.

Allons, ne grincez pas des dents,
Vous avez l’âge de raison :
Quant aux amours, depuis Adam,
On n’a pas changé de saison.

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dimanche 6 mars 2016

De la Poésie.





Des rimes à passer le temps,
Des mots fourre-tout simplement,
Quelque chose d’une berceuse
Ou d’une chanson paresseuse
Qu’on fredonne sans y penser.
Un rythme à ne pas se presser
Qui descend, monte et se dévide
Entre doucereux et acide,
Entre insouciant et solennel,
Entre bon-enfant et formel !
Un jeu sans grandes conséquences,
Mêlé de ruse et d’innocence,
De mensonge et de vérité,
De rêve et de réalité,
De mots féconds, de mots stériles,
De nécessaire et d’inutile.

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samedi 5 mars 2016

Excursion Hivernale.





L’Hiver est teint de neige et de feuillages roux,
De bleus lointains au sommet des montagnes
Et de ruisseaux brillants cachés dans la campagne
Qu’en regardant au loin on découvre d’un coup.
L’Hiver est teint de brume où le soleil s’irise
Au hasard d’un nuage à peine effiloché
En écharpes de soie et de dentelle grise
Par-dessus la colline, au-delà du clocher.
L’Hiver est teint de glace et de chemin de pierre
Où chaque pas résonne à son tour sèchement,
L’Hiver est teint de mousse aux deux bords des ornières
Et de mots hors d’haleine emportés par le vent.

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Le Cycle des Amours Déçues - XXI. Le Grandiloquent et l'Indifférente.






Sonnet des jours amers où le temps a passé
Ainsi que fuit la mer effaçant sur la plage
Le nom de nos amours et lassant le courage
De nos espoirs anciens trop longtemps pourchassés.

Poème des bonheurs et des lieux délaissés
Dont la rime est caduque et dont les mots enragent
De n’être qu’un reflet mélancolique et sage
Des passions de jadis et de tourments glacés.

Cendres que ces mots-ci que le vent froid disperse
En l’hiver de nos cœurs, sur nos lèvres qu’il gerce ;
Il ne reste plus rien d’un éphémère été.

Tant de force et d’ardeur pour si peu de poussière,
Il faudrait en sourire ou mieux, le méditer,
Je suis bouleversé que vous en soyez fière.

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vendredi 4 mars 2016

Le Soliloque Grognon.





Il n’y a plus grand-chose à raconter
En ces beaux jours d’un monde si moderne ;
Toutes les mines sont propriété
De la finance, au fond de leurs cavernes
Les pauvres nains sont morts de faim,
Quant aux dragons, plus aucun ne s’envole
De peur de percuter, même aux confins
Du ciel, la ferraille qui caracole
Dans tous les sens au-dessus de nos toits.
Tous les enfants croient qu’une « bonne fée »
Est une ménagère agile à en rester pantois,
Agile et plus ou moins bien attifée,
Que les trésors sont tous chez les banquiers
Et qu’un palais ressemble à l’Elysée.
Aucun ne sait ce qu’est un chevalier,
Les princesses sont métamorphosées
En chanteuses ou pire quelquefois,
On abat les forêts, les châteaux se visitent
Et si vous parlez d’hommage et de foi
Eh bien, c’est la cuisine qui s’invite :
Les plus doués penseront au pâté.
Le prospectus devient littérature,
Après quoi, devant tant de forfaitures,
Que voulez-vous qu’on ait à raconter ?

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mercredi 2 mars 2016

Le Platane des Ponts-Couverts.






En passant en ces lieux,
Promeneurs et curieux,
En vos heures rhénanes,
Saluez ce platane
Au pied des Ponts-Couverts.
Du temps que j’étais vert,
D’assez plaisant visage
Et plus jeune que sage,
J’y venais bien souvent.
Etais-je seul ? Le vent
Qui entend ce poème
Sourit et moi de même…
De sa beauté sans fard
J’avais plus que ma part
Et toute sa tendresse
Et mieux qu’une promesse
Et plus qu’un avant-goût;
Le bonheur disait : « nous »
A l’heure où l’ombre accueille
Le murmure des feuilles
Et la fraîcheur de l’eau.
Un bonheur sans défaut
Dont j’ai fait sur ma page
Ces trois vers à l’image
De ceux qui autrefois
Accompagnaient ma foi,
Mon rêve, mon hommage
Et puis notre partage…
Saluez ce platane
Pour moi, que Dieu condamne
A l’immobilité,
Aux bonheurs racontés
Où jadis se pavane ;
Saluez ce platane
En passant en ces lieux,
Promeneurs et curieux.

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