dimanche 19 juin 2016

Rêveur.





Le rêve est fait pour s’envoler,
Illustration de l’éphémère,
Laissant une joie douce-amère
Qu’aucune aube ne sait combler.

De ces heures ce qui subsiste
Ce sont tout au plus quelques vers
Qui bornent à peine la piste
De nos souvenirs au travers
Des jours si banals et divers,
Ébauche bien loin d’une liste
De plaisirs trop vite en-allés :
Le rêve est fait pour s’envoler.

                 *** 

lundi 6 juin 2016

1788 (II).







Ici c’est encore le calme et le silence
Mais l’étude n’est plus, il s’en faut, sans soucis.
Dehors un vent mauvais tourbillonne et s’élance,
Une rumeur grandit, prémices de violences,                                   
Un destin fait d’excès, d’ombre, d’erreurs aussi ;
C’est encore la calme et le silence ici.

Des tomes oubliés ouvrent les vieilles pages
D’une ode désuète, d’un sonnet dépassé,
Murmures harmonieux des amours d’un autre âge,
Et pourtant – regardez ! -, ni plus fous, ni plus sages…
Un parfum de papier que le temps a chassé
Sur des rayons lointains de poussière embrassés.

Ici le temps n’est plus à de vains bavardages,
Ma plume, hâtons-nous, l’époque a rétréci,
Les jours nous sont comptés, voici venir l’orage
Où l’amoureux des vers est un vain personnage
Et le gardien des mots, un songe-creux ranci ;
Hâtons-nous donc, ma plume et poursuivons ainsi,
Achevons le travail comme ces vers ici.

                               ***                                                       

La Rose Sans-Pareille.





          
Cette rose était sans pareille,
Elle n’a fleuri qu’une fois ;
L’éclat de sa splendeur vermeille
Eût fait l’admiration d’un roi.

Qu’en reste-t-il sinon l’épine
Sur la tige où plus rien ne croît ?
Pour cette rose,  on le devine,
Mon cœur se meurt comme son bois.

Tous les autres rosiers fleurissent
En mai, chaque nouveau printemps,
Pourquoi fallait-il que périsse
Le seul qui pour moi comptait tant ?

Rose fragile aux cent pétales,
Rose de Provins, de Damas,
Aucune de vous ne l’égale
Ni ne l’égalera, hélas.

                               ***        
        

mercredi 1 juin 2016

De Feuilles et de Pluie.



(Saumur.)


Il y a les feuilles si vertes
Et, si douce dessus, la pluie,
Un soir gris qui vous déconcerte
Dans ce dimanche qui s’ennuie.

Il y a le papier si blanc,
Il y a les mots incertains,
Peut-être un sourire troublant
Et l’ombre d’un autre matin…

Et tant, avant nous, de poètes,
Qu’il vous semble bien inutile
D’imiter la pluie qui s’entête
En cette chanson peu subtile ;

Il y a le bonheur aussi,
Il y a le bonheur pourtant,
Celui si simple d’être ici
Et celui de vivre l’instant.

                               ***

Longue nuit.




 Longue, trop longue nuit sans rêve qui l’égaye,
Faut-il que toute vie en tel sommeil se paye ?
S’il faut qu’avant le temps je connaisse ma mort,
A quoi me sert d’écrire, à quoi bon tout effort ?

S’il faut, jour après jour, cheminer et descendre
Toujours un peu plus près et de l’ombre et des cendres,
A quoi bon cultiver malgré tout les vertus
Et le courage avec, s’ils sont déjà battus ?

Un désert effrayant, hostile, aride, immense,
Où règnerait la nuit, le vide et le silence,
Un désert où se perdre et ne plus exister,
Un exil sans remède en son éternité…

Ô nuit, terrible nuit où meurt toute présence,
Infini de l’exil où la peur vous devance,
Pourquoi devons-nous vivre et pourquoi donc lutter
S’il nous faut te connaître et en vain t’affronter ?

                               ***