mercredi 11 janvier 2017

Le Sens de la Vie.



(Musée de l’Oeuvre Notre-Dame - Strasbourg.)


On voudrait faire un geste,
Peut-être écrire un mot
Et voilà que l’on reste,
Comme inerte, au repos.

Et le sens vous échappe
Tant des mots que du temps,
Leur vanité vous frappe
Et leur bêtise autant.

On sent bien que les pires
Sont les plus solennels
Et l’on a de quoi rire
Devant les plus charnels !

On s’imaginait vivre…
Et tout cela pour ça !
Comme on devait être ivre,
Comme on s’éveille las !

          ***


Conte de Fées.






Cendrillon aujourd’hui resterait Cendrillon
Et Gepetto serait sans pantin ni grillon,
Peau d’Âne rejoindrait la petite Cosette,
Peter Pan grandirait en oubliant Clochette
Quant au Charmeur de Rats il serait ouvrier
Et le Petit Poucet, tout à fait oublié.
A quoi bon vous parler de Riquet-à-la-Houppe,
Des Musiciens de Brême, un remarquable groupe,
Du Roi Bec-de-Corbin ou bien du Chat-Botté ?
Vous n’êtes pas de ceux qui s’en laissent conter,
Ces histoires d’antan -trop simples et trop brèves ?-
Ne vous conviennent plus, vous avez d’autres rêves
Mais c’est bien un peu triste et dommage à la fois ;
Si vous saviez combien de bonheur on leur doit,
Combien se sont assis avec un grand sourire
Auprès d’un lit d’enfant, le soir, pour les lui lire,
Si vous saviez combien de bonheur on leur doit
Et quels beaux souvenirs, comme je le sais moi !

                               ***

lundi 9 janvier 2017

Chanson à Boire.





Sinistre hiver de tout ce temps
Et sinistre hiver de mon âge,
De nuit, de jour, si mécontent
Et le pire est dans les parages…

Déboucherai-je un des flacons
Qui vieillissent dedans ma cave
Pour que le temps me soit moins long,
Pour alléger ce qui m’entrave ?

Je boirai le premier canon
A la santé de ce vieux monde
Et à la mienne, le second :
Il faut que je me dévergonde.

Je boirai le troisième au fond
A la santé de mes sottises,
Le quatrième sans raison
Afin d’en jouir à ma guise.

Quant au cinquième, il sera bu
A la très amère mémoire
De tout ce qu’autrefois j’ai cru
Mais le sixième pour la gloire.

Le septième, le plus précieux
Au nom de toutes les merveilles,
L’Amour compris -qu’est-il de mieux ?-
Que la prudence déconseille.

Hélas, ce sera le dernier,
Non que mon ange gardien veille,
Mais il n’en est, sans rien rogner,
Que sept au fond d’une bouteille.

                               ***

Le Diable et l'Ecriture.






Il y a un diable et, c'est certain,
D’humour grinçant et sardonique ;
Dieu, que se moquer est ludique
Et qu’être un homme est incertain !

Je me regarde et je me plains,
Le brouillard rit-il de la brume ?
Le peu que je tiens en mes mains
A chaque page se consume.

L’écriture je m’en convaincs                                
Peine à vous tenir compagnie,
Tout comme goûter seul son vin
N’embellit pas beaucoup la vie.

Il ya un diable et ce pendard
Inventa, je crois, le langage ;
Au mot « amour » il a sa part
A voir à quoi la chose engage.

C’est de même à lui que l’on doit,
J’en suis certain, le mot « poète »,
L’homme qui fait qu’on prête foi
Aux mirages qui nous entêtent.

Nous pourrions poursuivre longtemps
En prenant la mine sévère,
Nous ferions bien rire Satan
Que tous les écrivains révèrent.

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samedi 7 janvier 2017

Un Quai de Gare.






Le froid, un soir d’automne, un quai de gare,
Un train pris seul pour retourner chez soi
Où rien ne vous attend… Sans crier « gare ! »
La peine qui revient – qui sait pourquoi ? –
Plus lancinante encore et plus aigüe
Qu’elle ne savait l’être à ses débuts.
Promesse vaine, espérance déçue,
Et cet amour demeuré tel qu’il fut.

Fétus, fantômes inutiles,
Tremblements d’ombres dans le vent,
Souffles et murmures futiles,
Longue tristesse et sanglots lents...

Et si pourtant rien ne se renouvelle,
Rien ne revit, ne reste ou ne revient,
Combien au fond de bêtise se mêle
Au culte vain de ces chagrins anciens !
Que voulez-vous, c'est avec cet automne,  
Un bouquet gris de souvenirs aphones
Et l'absence où ce train vous reconduit.

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