jeudi 18 février 2016

La Foule.






Cette après-midi là, flânant par la cité,
J’y regardais, curieux, s’agiter une foule.
Chacun s’y déplaçait d’un pas précipité
Vers l’objet de sa course et cette humaine houle
S’en allait au hasard de mille volontés.
Un groupe interrompait sans raison son avance
Pour faire demi-tour et soudain se hâter
Quand un autre adoptait beaucoup de nonchalance,
Ils avaient tous un but mais l’ensemble hésitait.
On y changeait d’allure, on y changeait d’idée,
Tous ensemble ils formaient un flot qui s’agitait
Comme une mer inepte aux vagues saccadées,
Un océan variable et toujours imprévu,
Défilant lentement le long des devantures
Ou se précipitant – par quel coup de vent mu ? –
Pour changer de trottoir au milieu des voitures.

La foule en mouvement et en son sein,
Moi qui la suit et l’observe à dessein.

La foule, ainsi, plus puissante que tout,
Volage comme nous et incertaine,
Belle d’espoir et trouble de remous,
Source du droit et de l'erreur humaine…

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mercredi 17 février 2016

La Tanière aux Livres.






C’est un foyer douillet et presque une tanière
Où des livres partout, du parquet au plafond
Offrent aux habitants un silence profond
Et la paix et l’oubli qui sont leurs fins dernières.

Des camaïeux de gris calmes des jours d’hiver
Aux étangs d’or, l’été, de ces heures tranquilles,
Cet étrange lieu forme un « ici » de presqu’île
Que contourne le Sort en ses ruisseaux divers.

Dans ce temps qu’on ignore ou ce temps qu’on feuillète
Glissent quelques reflets sur la pointe des pieds
Et comme une ombre ancienne au parfum de papier
Que rien du monde à naître ou du défunt n’inquiète.

C’est un repli soyeux de savante poussière,
D’historique sagesse et d’inutiles riens
D’où vous pourrez gagner, si cela vous convient,
Cet au-delà sans nom des sentes traversières.

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mardi 16 février 2016

Le Cycle des Amours Déçues - XX. L'Obstiné.






Carême, hiver et carnaval
Et notre amour à leur semblance
Qui fit tant et qui fit si mal :
Dans un plateau de la balance
La tendresse aux pieds du désir
Et ce cœur brûlant de confiance
Mais dans l’autre s’en vont gésir
Le doute au bras de l’impatience,
La colère avec le chagrin,
Tant qu’il est beaucoup moins de roses
A notre rosier, je le crains,
Qu’il n’est d’épines et ma prose
Maintenant ne sert plus de rien.
Quant à ces rimes que je chante,
Elles ne font ni mieux, ni bien ;
Mes mots tiennent une brocante,
Parmi tous ceux qu’elle contient
« L’espérance », hélas,  est manquante,
Non  « la vérité » que je tiens
Pour meilleure et plus éloquente.
Voici les masques et le jeûne
Mais à quoi bon le repentir ?
La flamme danse, belle et jeune,
Que rien ne peut anéantir
Et dans la froidure hivernale
Des nuits qui ne finissent pas,
Aux routes septentrionales
Son feu guide encore mes pas.

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dimanche 14 février 2016

A la Saint-Valentin.



Musée de l’Oeuvre Notre-Dame. Strasbourg.

Longue journée et morne à force de silence,
Malgré les souvenirs, un vide immense
Où vont glisser les heures lentement,
Éphémères ou non, heureux amants,
Vous seuls, qui savez si bien vous suffire,
Vous connaissez en ce qui vous attire
Ce que vaut l’existence et seuls, à deux,
Vous saurez en combler le vide un peu.

Pardon, mais si ce n’est vous que je fête,
C’est de mémoire, un rêve que vous faites
Comme en son temps de même je l’ai fait
Pour l’oublier et ce jour, en effet,
M’en souvenir avec mélancolie.
Le feu consume et vos amours jolies,
Amants, heureux amants, s’envoleront
Comme fait la fumée et vous seront
Un jour d’une saint-Valentin future,
Source des mêmes mots je vous l’assure…

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Bon Anniversaire.



Musée de l’Oeuvre Notre-Dame. Strasbourg.



Souviens-toi des soixante-deux,
Merveilleux, faibles ou hideux,
Souviens-toi des soixante-deux !

De quoi parlé-je ? Eh bien des ans
Qui constituent ton existence,
D’amour, de peine et de présent
Changeant au gré des circonstances.

Du mauvais comme du bon temps,
Sentiers des bois, routes des plaines,
De ton voyage tout autant
Où je te vois bien perdre haleine ;

Pardon, je joue avec les mots,
Ce ne sera pas tout de suite.
Beaucoup de biens, beaucoup de maux
Vont dépendre de ta conduite.

Aussi tâche de bien choisir,
Toi qui possède l’expérience
Des catastrophes du désir
Et les arcanes de la science
De tout avoir sans rien saisir.

Souviens-toi des soixante-deux,
Merveilleux, faibles ou hideux,
Souviens-toi des soixante-deux !

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