dimanche 25 juin 2017

Chanson du quartier.





J’écris pour trois vieux marronniers
Dans un parc au bout de la rue,
J’écris les contes du quartier
Ou des rimes que j’ai conçues
Et nous passons un bon moment
Avant que la lune se lève ;
Ah ! si l’été durait vraiment
Au lieu de n’être qu’une trêve…

J’écris aussi quand il fait nuit
Pour le plus proche lampadaire
Grâce à l’éclat duquel je puis
Poursuivre l’œuvre solitaire
Où s’archivent, jour après jour,
Les poétiques aventures
Qui se jouent à mon carrefour
Entre portes et devantures.

Mais il n’y a, de vous à moi,
Pas de quoi vous mettre en émoi,
Pas de quoi faire une épopée,
Un chant ou une mélopée.

                                ***

vendredi 23 juin 2017

Nuit de juin.



(Lac de Côme - Italie.)

En juin la nuit sent la forêt
Et les sentiers perdus dans l’ombre,
L’odeur des près quand le jour sombre
Au bord émoussé des sommets.

Elle sent aussi le voyage,
Le changement, la liberté,
Le songe et la tranquillité,
Peut-être un amour de passage…

Elle sent ce parfum précieux
De ces roses de notre enfance
Et des grands jardins oublieux
Au long de nos belles vacances.

Et quand on passe la minuit,
A l’heure où la fraicheur de lève,
Lorsque l’on n’entend plus un bruit,
La nuit de juin, toujours trop brève,
Offre à cette heure qui s’enfuit
Toutes les fragrances du rêve.

                               ***        

mercredi 21 juin 2017

L'Estuaire.





Il faut quitter la mer et la côte et le vent,
L’écume sur le sable et la Loire au printemps,
La vieille forteresse et puis les toits de Nantes,
La pierre des clochers que le soleil enchante
Et ces reflets tremblants au bord des quais déserts
Qui savent ces vaisseaux dont l’histoire se perd
Dans les remous du fleuve et ceux de la mémoire ;
Il faut quitter la mer et les bords de la Loire,
Se faire une raison et puis rentrer chez soi
Et vivre en chaque jour tout ce qui vous déçoit.
Pourtant un goût de sel me demeure en la bouche,
Là-bas, sur l’estuaire où le soleil se couche,
Sans cesse la rumeur s’amenuise et reprend,
Sur la plage la vague,  ou reflue ou s’étend,
Et le bruit du ressac au chemin qui m’entraîne
Redit à mots couverts la Loire souveraine
Qui s’en vient épouser, maîtresse de céans,
Au cœur noir des brisants, tout là-bas, l’océan.

                               ***        

mardi 20 juin 2017

Pauvre métier.

(Frise de l'église d'Assier - Lot.)

Je ne connais qu’un seul métier,
C’est de chanter au long des routes
Tentant de plaire ou d’égayer,
Mais pas un passant ne m’écoute.
Pas un ne me donne un liard,
Du pain, ne fut-ce qu’une croûte,
Et tant qu’à vivre de déroutes
J’aurais mieux fait d’être pillard ;
Ce que l’on forge sur l’enclume
Quand on veut aller guerroyer,
Plus que ce que trace la plume,
Vous offre de quoi festoyer.
Si j’avais une hallebarde
En main et l’épée au côté
Au lieu du luth des pauvres bardes
Je serais beaucoup mieux traité.
Un ruffian que l’on mécontente
Se change vite en assassin,
Mais de ce qu’un poète chante
Qui s’en soucie, hormis les saints ?
Et Dieu peut-être quelquefois
Lorsque les affaires du monde
Où si souvent la guerre gronde
Lui laisse le temps d’un tel choix.
Mais si les saints ont de l’oreille,
Voire le Seigneur de surcroît,
Je n’en ai, quand je me réveille,
Pas beaucoup moins ni faim, ni froid.

                               ***

De l'autre côté.




La chambre, ombre et silence aux couleurs de l’été
Des volets clos, tandis que de l’autre côté,
L’après-midi sans fin tremble dans la lumière
Et que les trottoirs blancs brûlent dans la poussière.

Fraîche et douce lenteur, instants abandonnés,
Pénombre aux reflets ocres des vins surannés,
Paresse au délicieux parfum de vieilles pages
Et patine du temps au bord des rayonnages

Où dorment dans la paix d’un savoir sans saison,
Mille jardins perdus et mille déraisons
Et pour mille romans, mille péripéties,
Mille tomes ornés de mille poésies;

La main sans impatience et les feuillets épars,
L’incertain de la rime et le jeu du hasard
Et de l’autre côté des volets clos, ardentes,
Ces heures de l’été des villes trépidantes.

                               ***