mercredi 2 décembre 2015

Le Comptable.






Le sévère Vieillard qui compte nos instants
Ne les compte jamais de semblable manière :
Quand ils nous sont très doux, ils durent peu de temps,
Quand ils nous sont cruels, ils n’ont pas de frontières.

Aux rivières des jours qui nous sont incertains,
Nos larmes sont de crue et nos rires d’étiage,
Et chacun, malgré tout, le dernier pas atteint,
N’entame qu’à regret son tout dernier voyage.

                                        ***
 


mardi 1 décembre 2015

Volupté.






Le temps qui coule en gouttes de pluie,
Trottoirs luisants et toits de suie,
Et bruisse en ruisseaux, dit l’automne
Mais dites-moi qui s’en étonne ?

A pas pressés ceux qui s’en vont
Ne disent pas – je crois – « rêvons »
Puisqu’ils s’en vont à pas pressés,
A reculons, déjà lassés

Dans ce temps d’automne maussade
Aux interminables façades,
De rue obscure en rue obscure,
Vers un destin dont ils n’ont cure,

Puisqu’ils s’en vont et moi seul, non,
Qui rêve à ma fenêtre un nom
De tendresse et d’or et d’été,
De joie, d’amour, de volupté.

                          ***

dimanche 29 novembre 2015

Fin D'Après-Midi.




C’est déjà la pénombre,
Celle des fins d’après-midi
Où l’hiver lui-même s’annonce,
Un repliement sur soi, ici
Et toujours maintenant
Comme un autre aspect du silence
Mélancoliquement
Peut-être qui dispense
De hier et de demain.
Un « entre-deux » étrange
Que l’ombre teint
D’une éternité de rechange,
« L’avec soi-même » et puis l’instant
Qui dure et s’assombrit si sombre
Qu’on n’y peut rien lire et pourtant
Combien de mots qu’il vous incombe
-Des mots et des images –
Qu’il vous incombe en cet instant d’éternité
De mettre en page
Et de compter...

                             ***
 

mardi 24 novembre 2015

Le Cycle des Amours Déçues - X: L'Erreur.






Je chante une chanson pour moi,
Une chanson ancienne et triste ;
Je pense que tu sais pourquoi
Il n’est pas besoin que j’insiste.

Ce n’était pas le bon moment,
Pas non plus une bonne idée,
Ce n’était pas le bon amant,
Pas plus la route décidée.

Ce n’était pas le bon moyen,
Non plus que la bonne manière,
Pas le meilleur, non plus le bien,
Pas un chemin mais une ornière.

Ce n’était pas ce qu’il fallait,
Ni rédemption, ni sauvetage
Mais c’était un amour complet
Qui l’est toujours et d’avantage.

                    ***

Les Oubliées.







Elles sont trois, Mégère, Alecto, Tisiphone,
La Haine, Implacable, et la Vengeance en personne,
La crainte des humains et le dégoût des dieux
Et des larmes de sang leur emplissent les yeux.

Elles sont trois, Clotho, Lachesis, Atropos,
Crainte de l’oekoumène et terme du logos
Et filles toutes trois de la Nécessité
Que rien ne peut fléchir, ni ne peut arrêter.

Antiques à souhait et pourtant oubliées,
Prêtes à toute horreur, à toute mort liées,
Et les trois sans pitié et les trois sans merci
Que vous pensiez si loin quand elles sont ici.

Les trois Parques bien sûr et les trois Erinyes,
Figures d’épouvante et que la raison nie
En vain. Ouvrez les yeux et dans ce monde hagard
Vous ne manquerez pas de croiser leur regard.

                                   ***