mercredi 8 avril 2015

Canzoniere de Pétrarque. Transposition du sonnet II.






Sonnet II :Comment il fût victime des embûches de l’Amour. »[1]

Comme il voulait punir d’un seul  trait mille offenses,
L’Amour, en se cachant, ourdit ce guet-apens ;
Sans bruit il prit son arc et choisit son moment
Avant que de lancer le fer de sa vengeance.

Dans mon cœur et mes yeux, confiante en leurs défenses,
Ma vertu se croyait à l’abri du tourment
Mais la flèche frappa –et  quel étonnement –
Où toutes s’émoussant, montraient leur impuissance,

Et voyant sa vigueur surprise en un instant,
Troublée à cet assaut, elle n’eut pas le temps
Aussi bien d’esquiver que de prendre les armes,

Pas plus que de chercher par un retrait prudent
Sur quelque cime altière à parer aux alarmes
Qu’elle veut mais ne peut plus guérir maintenant.



[1] Dans : Canzoniere – Pétrarque, nrf, Poésie/Gallimard. 1983.



lundi 6 avril 2015

La Chanson du Dépit.






Les nuits qui succèdent aux nuits
Sans amour aucune et sans haine,
Reprennent la même rengaine
Que le même refrain conduit.

Où sont les fleurs de la prairie,
Où sont les roses du printemps,
Dites, la Belle, je vous prie,
Où sont les promesses d’antan ?

Vous me causez bien grande peine,
Vous me causez bien du souci ;
Je ne mérite point vos haines,
Non plus que ce silence ci.

Où sont les fleurs de la prairie,
Où sont les roses du printemps,
Que le soir rêve ou l’aube rie,
Où est le lit qui nous attend ?

Vous me décevez bien la Belle,
Quoique vos yeux soient fort charmants ;
Vous m’avez été peu fidèle,
Je ne serai plus votre amant.

Où sont les fleurs de la prairie,
Où sont les roses du printemps ?
Hélas leur racine est pourrie,
Elles mourront dans peu de temps.

                    ***

vendredi 3 avril 2015

Décor.






La pièce était le bureau de mon père
Mais le bureau, j’entends le meuble en bois,
Avec son désordre unique est à moi
Et la tapisserie à ma grand-mère,

Les livres, eux, sont venus de partout,
Quant à la ville, elle offre la poussière
Et le petit Saint-Nicolas en pierre
Fut à ma mère à je ne sais quel coût.

Le lustre au plafond est de mon enfance,
Je la retrouve un peu quand je l’allume,
Sans changements, comme il est de coutume :
Loisirs et paix au parfum de vacances,

Mélange étrange où je suis tout cela
Qui passé pourtant s’efface et demeure
Toujours vivant jusqu’à ce que je meure
Et que l’absence y mette le holà.

Mélange d’aujourd’huis remplis de vide
Et de velléités, d’espoirs alliés,
Semis de faits et gestes oubliés,
De hiers trop pleins, de jeunesse et de rides,

Foule d’objets au plus grand des hasards,
Ces « trois-fois-riens » forment autant d’indices,
De « toujours-prêts » à rentrer dans la lice,
Si familiers, des muets aux bavards…

Et je m’écris en eux qui sont mémoire
Et plénitude et bonheur même encor
Comme ils me sont aussi regrets, remords,
Échos sans fin et reflets d’une histoire.

                       ***

jeudi 2 avril 2015

Comme...






Mon amour est comme le vent
Aux vergers fleuris du printemps,
Toute fougue et toute tendresse,
Toute douceur, toute tendresse,

Mon amour est comme un ruisseau
Quand le soleil jaillit de l’eau
En mille perles murmurantes
Aux pieds d’une aurore enivrante,




Mon amour est comme un grand champ
Où s’élève déjà le chant
Futur d’une moisson vermeille
En chaque pousse qui s’éveille,

Mon amour est comme un grand bois
Aux verdures en grand arroi,
Au parfum de mille violettes
Que le chèvrefeuille complète,



Mon amour est quatre saisons,
Une espérance, un horizon,
Mon amour est une parole
Dont le refrain vers vous s’envole.

                 ***