samedi 3 février 2018

Dire n'importe quoi: vers "ad hoc".




Calme crépuscule d’hiver
Qui tend sur le quartier désert
Son camaïeu de gris et rose ;
Déjà samedi se repose
En se réfugiant bien au chaud
Entre thés et petits gâteaux.
Un vieux napperon en dentelle
En savourant l’instant rappelle
Au filet d’or d’un sucrier
Les longs rituels oubliés
Des après-midis plein d’usages,
De tartines en papotages
Et dans un coin sombre un plumeau,
Plumé d’autruche, fait le beau.
« Ah, dans cette époque sans pègre,
La crème au moins n’était pas maigre
Et dans votre tasse de thé
Offrait un bonheur velouté ;
Il est loin le temps, ma parole,
Des douceurs et des barcarolles! »
Soupire un biscuit de santé
Auprès d’un toast juste apprêté,
Et l’on voit acquiescer la troupe
Du chœur virginal des soucoupes,
Et les ombres, un peu partout,
Vont tremblotant des pleurs très doux ;
Suave ainsi qu’une dernière note,
En rose et gris, le soir radote…

                               ***        

jeudi 1 février 2018

Conte.




Les monts chevauchent l’horizon bleuté,
Le soleil court au travers des nuages
Et le vent froid file sans s’arrêter ;
Les monts chevauchent l’horizon bleuté.

Si je pouvais me faire oiseau sauvage
Pour m’en aller là-bas en liberté !

Un magicien m’a dit « Ta volonté
Et ton cœur peuvent tout et davantage,
Voici les mots qu’il te faut écoute. »
Moi, de croire à cela je n’ai plus l’âge...

Ces mots pourtant je les ai répétés
Avec au cœur un désir sans partage.

Comme un fétu me voici transporté
Au gré d’un souffle de passage ;
Dans la lumière où je me sens flotter
Je suis l’oiseau, l’ombre dans son sillage,
Le lointain vierge et le vent indompté;

Les monts chevauchent l’horizon bleuté,
Le soleil court au travers des nuages.

                               ***        

Paysage.




Soleil voilé, temps gris,
Que s’envolent ces pages,
Je n’en ai rien appris ;
Soleil voilé, temps gris.

Doctes leçons, savants ouvrages
Et vous tous, travaux entrepris
A grand renfort d’apprentissage,
De mémoire autant que d’écrits,

Je vous dis sans ambages
-Car je suis malappris –
Assez de l’esclavage,
Je sors: pas vu, pas pris !
Soleil voilé, temps gris.

Vous me gâchez le paysage
Et me laissez le cœur flétri,
Vous m’ennuyez, je suis volage,
Adieu manuels rabougris !

Au fond de mon esprit
Flottent d’autres images ;
Soleil voilé, temps gris,
Que s’envolent ces pages !

                               ***