jeudi 6 juillet 2017

Ma belle nuit.

(Venise.)
Ma nuit, ma belle nuit
Que voulez-vous donc faire,
Nulle étoile ne luit,
Ma nuit, ma belle nuit ?

Songer m’est un ennui
Et je ne peux me taire,
Ma nuit, ma belle nuit
Que voulez-vous donc faire ?

                               ***

mardi 4 juillet 2017

Un vieux chêne.





Les bois touffus ont tant vieilli
Qu’il n’y reste plus qu’un vieux chêne
Entouré d’un maigre taillis
Que ce vieillard étonne et gêne.

Le chant de son feuillage au vent
Ne leur dit rien ; ils ne comprennent
Plus les mots dont on usait avant,
Les mots des hêtres et des frênes,

Des mélèzes, des grands sapins,
Des confidences de la brise,
Ni des rumeurs dans les lointains
Dont quelque tempête se grise.

Les bois chantaient à l’unisson
La même harmonieuse mesure
Mais qu’attendre de ces buissons
Bons à couvrir quelque masure,

Lequel en premier dit : « cessons ! » ?
Le vieux chêne rêve et chantonne
Pour lui tout seul une chanson
Dont quelques arbustes s’étonnent.


                               ***

lundi 3 juillet 2017

Amours printanières.





Passants passez dans les rues, enlacés,
Puisque voici le temps des amours neuves ;
Dans les jardins, en voulez-vous la preuve ?
Voici la rose au rouge outre-passé
De vos passions, d’émeraude espérance,
Et de ce sang qui bat si fort en vous
Qu’il faudrait peu, si vous n’aviez de chance,
Pour en mourir de passion à ce coup.
Laissez donc cette prose où vit, poète,
Celui qui sut à force de l’aimer
Qu’Amour n’en fait jamais mieux qu’à sa tête,
Songeant qu’alors il faisait bon semer.
Laissez, passants ! Et puis passez, sourire
Aux bords de rêves infinis, chassant
L’Hiver aux flammes de ce feu pressant
Que rien ne saura jamais circonscrire !

                               ***                      

samedi 1 juillet 2017

Une nuit pluvieuse.



(Eglise St-Guillaume - Strasbourg.)

Je me suis réveillé en nage,
Sans doute était-ce un cauchemar,
Il n’en reste pas une image,
J’écoute, il doit être bien tard,

L’averse fait le bruit de l’eau
Qui court vers la plaine en cascade,
Un bruit têtu, un peu maussade,
Où la nuit s’endort à nouveau.

Et dans le ciel obscur et vague
Glisse un océan de rumeurs,
Où les heures s’en vont et meurent
Au rythme des vents qui divaguent.

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Satire.

(Fontaine à Aubenas - Ardèche.)

La nuit de juin est silencieuse,
Ma Muse est d’humeur facétieuse
Et je voudrais en profiter
Car on ne peut guère compter
Que toutes les nuits se ressemblent.
Au ciel où les étoiles tremblent
De leurs feux toujours incertains
Que nous cache donc le destin ?
Alors pourquoi  ne pas sourire
De soi, de tout et puis d’écrire ?
De l’Histoire au bruit de ressac
Qui met pêle-mêle en son sac
Les gloires et les infamies ?
La Politique, son amie,
Et ses innombrables tribuns
Dont il suffit de connaître un
Pour savoir ce qu’on peut attendre
De tous quoiqu’ils fassent entendre,
Lui ressemble et ne vaut pas mieux :
Elle se plaît aux mauvais lieux.
Et l’Art ne fait-il pas de même ?
On récolte ce que l’on sème,
De la rose ou du pissenlit ;
Que de toges ont de faux-plis !
Que de faux-nez parmi nos gloires
Et que de naïfs pour les croire !

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