mardi 17 mai 2016

Requiem.






Que vous chanterai-je aujourd’hui
Puisque je sais les chansons vaines
Et qu’il va bientôt faire nuit :
Que vous chanterai-je aujourd’hui ?

Une complainte ? Quel ennui !
Une ronde ? J’en sais à peine.
Un canon ? Seul je ne le puis.
Ou quelque comptine incertaine ?
Un chant d’amour ? L’amour me nuit.
Que vous chanterai-je aujourd’hui
Puisque je sais les chansons vaines ?

Ma foi, peut-être bien ceci.

La minute « d’après » me glace
Où je me vois, ne voyant plus
Puisque en moi je n’ai plus de place
Et qu’il fait froid où mon cœur fût.
Ce cœur qui ne sait plus que j’aime,
Ces mains que l’on dirait de bois
Et ces lèvres qui se sont tues…
Demain je serai à l’étroit
Sous un peu de terre battue,
Que dès lors je ne sois plus rien,
Que sur terre mon nom s’efface,
Puisqu’il le faut…
                               Mais, j’en conviens :
La minute « d’après » me glace.

                               ***                      

vendredi 13 mai 2016

Au Bon Retour.




Peu me chaut les hautes montagnes
Et leurs neiges sous le ciel bleu
Peu me chaut la belle campagne ;
France ? Italie ? A qui les veut !

Horizons lointains, découvertes,
Beautés, naturelles ou non,
Parfums, lumière en pure perte,
Trésors dont j’ignore les noms,

Poussière enfuie au vent qui souffle
Sans me causer le moindre émoi :
Je suis heureux dans mes pantoufles
Au bon retour en mon chez-moi.

Voyez ici comment s’exprime
Ce grand plaisir qui m’est de droit
Lorsque j'en tourne quelques rimes :
Ayant fait tout ce que je dois
Je me réjouis en mon intime
Au bon retour en mon chez moi.

                               ***       

mardi 10 mai 2016

La Couleuvre D'Or.







Il dort
Au fond de moi
Une couleuvre d’or
Ignorante des lois,
Un serpent
Débonnaire
Aux yeux d’argent,
Aussi patient
Que je suis éphémère,
Aussi vieux
Que le bois, le nuage et la terre,
Aussi joyeux
Que la Mort est amère…

                               ***                 

     

Autre Soliloque.







Soliloque nocturne au bras d’un édredon
Ou bien d’un oreiller qui, s’est connu, s’en fiche,
Je gère mon passé, je vis mes abandons ;
Malheureux le pauvre homme et bienheureux le riche.

Puisqu’ils sont tous partis, qu’il ne reste que moi,
A qui d’autre parler si ce n’est à moi-même ?
Je ne sais sur quel ton, mais je sais bien le thème,
C’est encore l’amour mais l’amour sans émoi.

Chaque jour tout au long des Douze de l’année,
A mâcher, remâcher, décrire et rabâcher,
Déplorer, regretter, reprendre et se fâcher,
Dire la même chose à ma page étonnée,

Et dans la nuit profonde où nichent d’autres faims,
De l’éclat d’un regard à celui d’un sourire,
En récapitulant tous les chemins du pire,
Chercher à s’endormir en maugréant sans fin.

                               ***    

    

lundi 9 mai 2016

Un Petit Tour.






Un petit tour en solitaire
Le long d’un quai nommé « Printemps »
A l’heure où le soleil éclaire
Les marronniers d’un feu rasant.

A l’heure où vient le crépuscule,
Un petit tour tranquillement :
Douceur du moment où bascule
Ce jour en demain uniment.

A peine au cœur une pensée
Et quelques pages sur un banc,
Autour, en une heure passée,
Le monde entier en un arpent.

Tout ce qui plaît a sa mesure,
Mais le bonheur n’en connaît pas,
Quand bien même son temps ne dure
Qu’une lecture et quelques pas.

                     ***