lundi 20 novembre 2017

Coup de balai.





On fait quelquefois le ménage
Au grand dam de nos souvenirs,
Dont certains font plus que leur âge ;
Comment pourrait-on retenir
Tous les fragments ou les scories
Qui s’amassent au cours du temps,
Ce temps où l’on vit une vie
Qui ne vous semble qu’un instant ?
Il faut bien faire la poussière
Et donner un coup de balai.
Adieu guenilles familières,
Belles images feu-follets
Et ces beaux moment qui se voilent
D’ombre, de tristesse et d’oubli.
A quoi bon ces fragments d’étoiles
Qu’une longue attente a terni ?
Les jours nous ont laissé des gages
Qui ne nous servent plus à rien
C’est pourquoi pour son propre bien
On fait quelquefois le ménage.

                               ***        

mardi 14 novembre 2017

Et.




Et le soir m’a trouvé, penché comme autrefois
Sur une feuille blanche où lentement les songes
Glissaient entre les mots, un peu comme s’allonge
La brume de l’aurore autour des troncs d’un bois.

J’entendais murmurer, indistinctes ces voix
Où se mêlent toujours vérités et mensonges,
La voix des souvenirs que leur écho prolonge
Accompagnant mes vers au nom d’étranges lois.

Comme la vague meurt au pied de la falaise,
Comme au feu de minuit va s’éteindre la braise,
D’entre mes doigts déjà cette stance s’enfuit.

N'en cherchez pas le sens aux lignes dont je pense
Qu’on ne peut retenir,  guère plus d’une nuit,
Ni le bruissement vain ni la vaine impatience.

                               ***

dimanche 12 novembre 2017

Guillaume et Péronnelle.



(Jardins du Château de Villandry - Indre et Loir.)

On ne connaît plus les amours
De Guillaume et de Péronnelle :
Un vieux poète, une pucelle,
Une langue qui n’a plus cours…

Qui croit que des vers de nos jours
Pourraient charmer une donzelle ?
On ne connaît plus les amours
De Guillaume et de Péronnelle.

Tout rimailleur sur le retour
Trouvera l’histoire assez belle
Mais pas la moindre demoiselle
Aussi ma strophe tourne court ;
On ne connaît plus les amours
De Guillaume et de Péronnelle.

                               ***        

Note: Péronnelle d'Armentières, âgée de quinze à vingt ans tomba amoureuse du poète Guillaume de Machaut (1300-1377), déjà vieux, à la seule lecture de ses vers. Elle le lui écrivit et devînt sa maîtresse.
Des vers et des lettres qu'ils échangèrent, Guillaume, à sa demande, fit le Livre du Voir Dit (le Livre du Dire Vrai), où sont ainsi contées leurs trop éphémères amours.

                               ***

vendredi 10 novembre 2017

Ocre.




La lumière décroît, l’ocre d’un soir d’hiver
S’étend sur les murs gris aux balustres de fer,
Le jour va s’achever, la lumière décroît,
L’ombre est mélancolique et paisible à la fois.

La pièce est silencieuse et les fenêtres pâles
Veillent tranquillement sur la nuit qui s’installe.
On dirait que le temps hésite et s’interroge ;
Quelle heure est-il vraiment à cette vieille horloge ?

Un objet ou un nom où sommeille une image,
On feuillette un moment un livre aux mille pages
Que l’on n’a pas écrit : « le livre de l’absence »,
A moitié doux-amer ou bien reconnaissance.

La pénombre s’accroît, on allume dehors,
Le crépuscule meurt, le crépuscule est mort ;
Pourquoi soupirez-vous ? La pénombre s’accroît,
Pendant un court moment on a peut-être eu froid.

                               ***

lundi 6 novembre 2017

Sur la colline.



(Magrin - Tarn.)




Comme il fait bon sur la colline
Dessous le soleil caressant
Qui, longue à vos côtés, dessine
Une ombre au pas si languissant.

Ombre aux douces réminiscences
Qui précèdent l’obscurité,
Novembre est de la même essence
Parfois que le plus bel été.

Puisse l’hiver être sans neige,
Adieu décembre, adieu janvier,
Dis-moi vers quel printemps m’en vais-je ;
La feuille meurt au peuplier.

                               ***

samedi 4 novembre 2017

Au sud.




Dans cette douce nonchalance
Où le jour prêt à s’achever
Un instant encore balance,
On se laisse aller à rêver.
Voici la raison, fantaisie,
Tous les soucis, des illusions
Et la tristesse une hérésie ;
L’ombre poursuit sa progression.
Le ciel est d’un turquoise pâle,
Le cyprès noir se teint de gris,
Mince trait qui transperce l’opale
Du crépuscule et je souris
Pensant à mille choses vagues
Qui viennent bruire en mon esprit
Comme une mer aux longues vagues
Au long d’un rivage endormi.

                               ***