mardi 4 août 2015

L'Eté en Ville.






Couleur d’un été de province
Les immeubles sont silencieux
Au pied desquels midi évince
Un cerne d’ombre consciencieux.

Il n’y a plus personne en ville,
Les tramways ne vont nulle part
Au bout de leurs rails inutiles
Où poussent des chardons épars.

Il est temps de changer d’écorce
Pour les platanes poussiéreux
Sous ce ciel toujours vide à force
D’être aussi profondément bleu

Et les vieux bancs de bois s’écaillent,
Solitaires, dans la chaleur
Et les gazons couleur de paille
Rêvent d’une fontaine en pleurs.

                    ***
 

Bifurcation.






La route qui bifurque ici
N’explique pas ses horizons,
Le sort, sans doute, a ses raisons
Et c’est peut-être mieux ainsi.

Le vent qui balaye les quais
Y fait un bruit de feuilles mortes,
Le mois d’août charge ses paquets,
L’été va repasser la porte.

Un jour  « zénith » et « apogée »
Deviennent des mots inutiles,
Nos désirs ont changé de style,
Une autre chaîne s’est forgée.

Au pied du pont, au bord de l’eau,
On voit faner les herbes folles
Et tout un automne est enclos
Dans chaque feuille qui s’envole.

                     ***
 

lundi 3 août 2015

Le Bois D'Amour.






Rondeau de la pluie enchantée
Qui tombe sur le bois d’Amour
Un été d’heures décomptées
Avant la naissance du jour
Dans l’odeur des feuilles mouillées.

Me donnerez-vous un baiser
Au jour naissant d’aube ennuyée ?
Si je l’espère, il faut l’oser
Ou la rime est imméritée ;
Rondeau de la pluie enchantée.

Et tout un jour à dépasser,
Que rien ne change, ni ne presse
Avant que de recommencer ;
Mon Dieu, mon Dieu, quelle tristesse !
Il pleut sur la plaine oubliée
Et sur le chemin du retour ;
Rondeau de la pluie enchantée
Qui tombe sur le bois d’Amour.

                   ***

samedi 1 août 2015

Incertitude.






Ainsi passent les jours, ainsi vont les nuages,
Alternativement sombres ou lumineux,
A qui ferai-je outrage
Si je parle moins d’eux ?

L’amour,  comme le feu, étincelle et dévore,
Chacun, selon le vent, s’exaspère ou s’éteint,
Qui, si je les ignore,
Me trouvera hautain ?

Rien ne ressemble plus au cours d’une rivière
Que le cours d’une vie en ses reflets changeants,
Filet d’eau sur la pierre
Ou flot intransigeant,

Dites-moi qui j’afflige
Si je la chante moins ?
Mais tout cela posé, qu’il faut que je néglige,
Sur quel sujet rimer s’il ne m’en reste point ?

                           ***

La Folie.






Paysages lointains, vous qui n’existez pas,
Aux quatre coins perdus des terres de Folie,
Qu’il doit être puissant ce charme qui vous lie
L’âme d’un malheureux jusqu’au jour du trépas !

Qu’a-t-il vu, qu’a-t-il fait, d’excessif ou d’horrible,
Celui qui laisse tout pour vos sombres attraits ?
Celui qui, chez les siens, va trahir son portait
Et dont ne peut pas changer le sort terrible ?

Aurait-il éveillé la vindicte d’un dieu
Par quelque acte barbare ou quelque mot impie ?
Aurait-il mérité la haine des Harpies
Par quelque trahison ou bien quelque acte odieux ?

Est-ce sa propre peur ou sa propre faiblesse
Qui l’ont persuadé de prendre ce chemin
Pour mieux vivre au présent mais se perdre demain ?
Qui sont-ils donc ceux-ci que vivre avec nous blesse ?

Qui sont-ils donc ceux-ci qui nous nous font orphelins,
S’ils étaient notre amour, de toutes leurs caresses,
S’ils étaient nos amis, de toute leur tendresse,
Pour se perdre à jamais aux pays du déclin ?

Et nous nous demandons pourquoi la même peine
Qui les a fait s’enfuir peut nous laisser ici
Avec dans nos regrets quelques remords aussi
De les abandonner à ce qui les entraine.

                             ***