|
(Le Pouldu - Bretagne.) |
De papier j’ai fait un bateau
Pour qu’il descende la rivière,
Pour qu’il descende le ruisseau,
Sa course devait être fière
Mais que voulez-vous, il prend l’eau.
C’était une mauvaise idée,
Ce pauvre esquif n’ira pas loin ;
Le long de la rive bordée
De saules taillés avec soin
Il ne tiendra pas la journée.
Il disparaîtra sans un mot
Au pied d’un chêne séculaire
Ou bien peut-être d’un ormeau
Sans avoir connu l’estuaire
Où, le fleuve oubliant la rive,
La vague et l’horizon arrivent.
Et la vague avec l’horizon
Disent tous deux le même nom,
Celui que portait ce navire
De papier qui là-bas chavire
Et tous ceux qui devront tenter
La même course : « Liberté ».
Mais le suivant sera de toile
Avec une coque de bois
Pour s’en aller loin à la voile,
Loin, très loin de ces bords étroits.
Si celui-là aussi se perd
Je ferai le dernier de fer,
De chaudière comme d’hélices
Afin que son étrave glisse
Par les tempêtes au travers
Jusqu’à parvenir à la mer
Pour laquelle il fut baptisé,
D’un nom si souvent refusé.
***