Profession d'autrefois.

Sorbonnards et sorbonnicoles

Me jugeront, je crois, frivole

Et sot et irrévérencieux.

Ils sont savants, ils sont sérieux,

On ne me connaît aucun titre,

Je parle à tort et à travers,

Je suis un fou, je suis un pitre

Et je prétends faire des vers.

Les faire encor c’est peu de choses

Mais en parler, les expliquer !?

On va m’envoyer sur les roses :

De quoi suis-je allé me piquer ?

Des vers que chacun pourrait lire,

Comprendre, aimer et répéter

Et qui, c’est la cause de l’ire,

Méprisent la modernité ?!

Je ne pouvais pas faire pire,

On devrait me décapiter

-Au figuré- c’est assez dire !

Mais j’ai pour moi l’humanité.

                               ***

Fin de semaine.

(Cathédrale Notre-Dame de Strasbourg - Détail du portail St. Laurent.)

Lorsque enfin je parviens au bout de la semaine,

Je suis si las que je ne suis plus bon à rien.

Je rêve de ce jour mais quand enfin il vient

Je le laisse s’enfuir car je suis hors d’haleine.

Et tout cela m’agace et me pèse et me peine ;

Puis-je faire autrement ? Non, et je le sais bien.

Je peste, je proteste et tout ce que j’obtiens

C’est le sonnet bancal d’une colère vaine.

Mais en l’imaginant je suis pour un instant

L’amusé, l’amuseur et le maître du temps ;

Il n’est donc pas aussi noir ce jour où je compose.

D’autant que cette fois je fais ce qui me plaît

Sans tomber de sommeil au milieu de la chose

Et qu’à lire ces vers ils ne sont pas si laids.

                               ***

Conseils à un jeune poète.

(Portail de la cathédrale de Chartres.)

D’abord prenez un mot, le premier qui vous vient ;

Réfléchissez un peu. Vous l’avez fait ? C’est bien.

Vous tenez une histoire, il vous faut une rime,

Réfléchissez un peu. Vous l’avez ? C’est sublime !

Recommencez cent fois le même processus :

Vous êtes un poète, il ne faut rien de plus

Mais s’il vous arrivait, quelquefois, d’aventure,

De manquer d’une rime, allons, je vous rassure,

Qui donc vous en voudra ? Laissez la de côté,

Poursuivez votre ouvrage avec sérénité.

D’ailleurs, pour progresser, à l’étape suivante,

Estimant que la lettre est toujours décevante,

Que ce qui compte au fond, c’est avant tout le fond,

Faites à votre tour ce que les autres font.

Affranchissez-vous en et rédigez vos lignes

Comme chacune vient, c’est une règle insigne,

Voilà qui fait de vous un talent prometteur

Et si vous rêvez d’être un des plus grands auteurs

Il ne vous manque plus, et vous pouvez m’en croire,

Que de vous faire obscur pour tutoyer la gloire.

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