mardi 7 février 2017

Le Témoin.





L’étranger dit : « Je suis votre témoin,
D’ombre et de nuit à charge,
D’aurore aussi et à décharge ;
Je suis venu de loin. »

Mon âme lui répond :
« Qui me condamne et qui m’acquitte
Et pour quel vol ou pour quel don ?
Qu’ai-je donc fait qui vous mérite ? »

« Vous, rien, car l’être est inutile
Et le vouloir est désastreux
Et vous ne comptez pas, objet futile,
Dans un univers hasardeux.
Mais l’homme est objet de scandale,
Tout homme l’est, tous le sont en chacun.
Je sais ce que vos heures valent
Car je vous connais un par un :
Je suis votre témoin. »

Tout cela se passait peut-être hier
Ou c’était hors du temps,
Le ciel était de fer,
La terre était de brume, une flamme devant.

« Vos mots parleront contre vous
Avec la force du reproche,
La colère pardessus tout.
C’est aussi pourquoi je m’approche ;
Je suis venu de loin.

Dans une main, que j’ouvre au vent,
Je tiens les cendres du désir,
Dans l’autre je garde avec soin,
Pour le produire maintenant,
Ce que rien ne pourra nier,
Ce que rien ne pourra ternir,
Ce qui ne peut être oublié,
Ce que rien ne peut abolir,
Ce qui vous sauve et qui me charme
Et qui vient de si loin :
L’éternel éclat d’une larme ;
Je suis votre témoin. »

                               ***

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