jeudi 29 janvier 2015

Les Rameaux Noirs.






Au temps de mon plus beau feuillage,
J'aimais ces amants de passage
Qui venaient s'asseoir à mes pieds,
Mais les amants m'ont oublié.

Quand vint le temps de ma parure
En or - que j'avais grande allure ! -,
Dans les yeux des amants brillait
Plus qu'eux-mêmes n'entrevoyaient.

Certains écoutaient mon murmure,
Combien d'autres n'en avaient cure
Qui s'échangeaient de grands serments
Comme ont toujours fait les amants.

Mais, hélas, les jours raccourcissent,
Les fruits tombent, les fleurs flétrissent
Et les feuilles s'en vont au vent;
Déjà plus rien n'est comme avant !

Et me voici de branches noires,
Muet et de vaine mémoire,
Cherchant l'écho des mots d'amour
Que j'entendais en d'autres jours...


              ***


mardi 27 janvier 2015

En Passant.





Il passe,
Quelque part à Paris,
Il passe
Un passant incompris
Qui se prend pour Verlaine
Ou peut-être Rimbaud
Et dont la tête est pleine
De rimes et de mots.
Mais le long de la Seine
Où passe
Ce rêveur dans la gêne,
Où passe
Le temps d'écrire en vers,
Le monde passe aussi
Et le monde l'ignore,
Il a d'autres soucis,
D'autres plaisirs encore
Que d'aller visiter
L'impasse
Où ce poète vit
Et passe
Ses jours sur un écrit.
Verlaine ou bien Villon,
Ronsard, Apollinaire
Ou Rimbaud, c'est selon;
Un échec ordinaire
Où passe au moins cette leçon:
L'impasse
D'être poète, mais passons...

               ***

lundi 26 janvier 2015

Un mot sur VERLAINE.







Ce qui n'est peut-être pas assez souligné dans la vie de ce poète.

A retrouver ici: http://faititre.blogspot.fr/2015/01/verlainereflexions-inhabituelles-et.html


    ***


Heure obscure où le ciel froid
Enneige en glissant des toits
Quelques allées et venues
De passants au fond des rues.

Dans le soir voilé qui vient,
Quelle crainte le retient,
Ce revenant qui se glisse,
Discret, discret ou jocrisse,
Ou simplement harassé
Et qui me ressemble assez ?

Est-ce un Arlequin fantôme,
Un roi privé de royaume,
Ce passant, cet autre ou moi
Qui s'en va sous le ciel froid ?

 ***


Péniches.





Les péniches dorment au port,
Hivernales et bord à bord
Et le ciel bas au bout des quais
A pris des hangars pour étais.
En ce dimanche sans besogne
Où le froid même se renfrogne,
Il neige aux rameaux dépouillés
D'un long rang noir de peupliers,
Il neige en lourds et lents flocons
Sur les silos et les wagons,
Il neige sur le port désert,
Sur le béton et sur le fer,
Le gravier et l'herbe jaunie
Et sur les tôles désunies
De ces ondulements rouillés
Qui couvrent d'anciens ateliers;
Il neige et le décor est triste.
Parfois on rencontre un cycliste
Emmitouflé, qu'un vieux chien suit
Ou même, retournant chez lui,
Ce passant là, qui vous ressemble
Au point qu'on vous croirait ensemble...
Un rêveur venu s'égarer,
Sans rien chercher ni désirer,
Près du bassin bordé de friches
Où vont hiberner les péniches.

                  ***

samedi 24 janvier 2015

Nuit d'été.





Je compose pour m’amuser
Mais combien la page est fragile
Et que les mots sont vite usés,
Qu’on en écrive cent ou mille.
Voici venir la nuit tranquille
Où monte le parfum des bois
Avec cette douceur subtile
Qui tient à je ne sais trop quoi
Mais qui vous remplit d’émotion.
Lorsque j’y repense il me semble
Que mes désirs, que mes passions
De presque toujours s’y rassemblent
Et vont m’y tenir leurs promesses.
Mais les mots et les sentiments
Souvent très follement s’empressent
Qui n’en durent pas plus longtemps.
Ils ne sont rien qu’un feu de paille,
De branchettes ou de sarments
Un feu qui crépite et qui raille
Nos discours et nos grands serments.
La toute-fin du jour exhale
La senteur grise des forêts
Et l’on voit la lune si pâle
Broder l’ombre d’argent discret…

                  *** 




 

mardi 20 janvier 2015

Les Neiges D'Antan.




Trois flocons par hasard font une farandole
Qui me semble de loin assez peu convaincue
Tant leur course est si loin d'être une course folle,
Tant ils vont lentement entre pignons et rue.

Mais l'on est en janvier où l'on fait des rabais
Sur tout ce qui se vend, et peut-être et sans doute,
Que l'Hiver fait de même en se disant qu'on plaît
Aux gens, en ce moment, d'autant moins qu'on leur coûte.

Aux temps où nous vivons il faut être prudent,
Il suffit d'assez peu pour être pris en haine,
Un schnauzer qui frissonne ou qui claque des dents...
Ainsi quelques flocons, quelques flocons à peine !

Pas de verglas bien sûr, peut-être un peu de vent,
Mais rien, rassurez-vous, qui vaille une congère...
Ah, qui m'expliquera comme on gérait avant
Ces hivers qu'aujourd'hui plus personne ne gère ?

                                  ***

mardi 13 janvier 2015

Janvier 2015.




Au plus proche des toits, un ciel vague d'ardoise
Où le brouillard s'irise en larmes de soleil
Et ces perles d'opale aux reflets de vermeil
Des buissons charbonneux de quelque hiver blasé,



Tout ce qui brille et tremble et s'élève et poudroie
De pignons en clochers au hasard d'un matin
Et l'éclat d'un instant qu'une vitre renvoie,
Et l'obscur des recoins qu'aucun midi n'atteint,



Et le sol endurci d'une lueur glacée
Qui cerne les massifs des squares endormis,
Les croassements noirs des corneilles pressées
Qui s'en vont au levant du même élan soumis,



Tout encense janvier et tout le justifie
Et qui donc parlerait de mauvaise saison ?
Tout l'admire et le loue et tout le magnifie
Sous ce voile de nacre estompé d'horizon.

                            ***





Entre Confrères...





Je suis bien un peu comme vous
Êtes au fond, du bord des rimes
A celui des prisons; abime
Et pinacle, brebis et loup.

Sourcils froncés, pourtant si doux
Et presque la même tristesse
Sans la fureur et sans l'ivresse,
Quelquefois aussi sans un sou...

Et si le pavé que j'arpente
Est autre, cependant sa pente
Suit la vôtre et d'ailleurs, en sus,

Mais les deux mains au fond des poches,
Le presque même pardessus
Usé, qu'un courant d'air embroche.

                    ***

Un Quatorze Juillet.


 



 
Je regarde tomber la pluie
Au gré des rafales de vent,
Tristesse des heures enfuies
Et solitaires si souvent…

C’est la complainte des averses
Qui se succèdent martelant
Les toits où l’obscurité verse
Les cendres d'un jour accablant

Et dans l’ombre inhospitalière
Accourent des ruisseaux boueux
Que ne guide aucune lumière
Vers quelque néant tortueux.

Ce qui me passe par la tête
Cet humide soir de juillet,
C’est le remords d’un air de fête,
Que vient consoler un souhait,

Un jeu qu'inventerait l'orage
Pour toutes celles et tous ceux
Dont le cœur soudain se rappelle
Qu'il avait prononcé des vœux...

                     ***

mercredi 31 décembre 2014

Au Dernier Jour de l'An.



Je l'ai vue vieillie et tremblante,
Assise dans un coin,
Peut-être pas vraiment dolente
Mais attristée à tout le moins.

Elle avait ce vague sourire
Qu'ont ceux qui s'éloignent de nous
Et se résignent à souscrire
A ce départ à pas de loup.

Et moi, moi qui l'avais si bien connue,
Je regardais d'ésabusé
Le peu qu'elle était devenue
Et ses pauvres habits usés.

Je ne pouvais plus rien pour elle
En qui j'avais mis tant d'espoir
Du temps qu'elle était jeune et belle;
Elle vivait son dernier soir.

Elle attendait, abandonnée,
Comme le monde attend minuit,
Lui pour s'en réjouir à grand bruit,
Elle, pour mourir dans l'année.

                 ***

lundi 29 décembre 2014

Deçà-Delà.






Un mot sur «Deçà-Delà ».

C’est le hasard qui nous a fait découvrir Bienfay LHOMIER, notre exemplaire de son œuvre provient d’un de ces petits édicules du « livre en liberté » où chacun peut à son gré déposer ou emporter un ou plusieurs livres de son choix.


L’auteur de ce petit ouvrage est demeuré aussi inconnu que lui et nous n’avons guère pu en savoir plus que ce que les documents administratifs les plus usuels peuvent livrer.


L’homme, Bienfay (Eustache, Léon, Marie) BERNAS, (LHOMIER est son nom de plume) est né 64, rue Saint-Lazare à Paris, 9ème, le 13 avril 1902, de


Claude, Louis, Marcel, Dieudonné BERNAS de Meaux (Seine et Marne), instituteur,


et,

Elise, Lucie, Adrienne CORBERET de Saint-Père sous Vézelay (Yonne) , montée de son Morvan natal à Paris pour y exercer le métier de nourrice dans une famille de la riche bourgeoisie, comme le firent beaucoup de jeunes femmes pauvres de cette région à la fin du XIXe siècle.



Bienfay LHOMIER, sensible aux thèses de la Seconde Internationale, adhère très tôt (18 ans) au parti socialiste français et ses choix transparaissent bien sûr à travers certains de ses textes. Il exerce le métier de son père dans plusieurs petites écoles de la capitale.


La seconde guerre mondiale l’incorpore comme fantassin dans le 120ème Régiment d’Infanterie, colonel CHRETIEN, de la 71ème  Division d’Infanterie, une division uniquement composée de réservistes et commandée par le Général BAUDET. Cette unité d’abord en réserve du front de Sedan, occupera le secteur Maugis-Mouzon juste avant la percée allemande du 10 mai. LHOMIER y trouvera la mort dans les violents combats du 13 mai 1940.


Il meurt « officiellement » célibataire. L’une ou l’autre des maîtresses que ses vers nous laissent lui supposer lui a-t-elle donné un enfant ? Impossible de le dire.


Nous n’avons pu déterminer les raisons ou influences précises qui le conduisirent à publier à l’âge de 20 ans « Deçà-Delà », son unique – à notre connaissance- recueil de poèmes. L’essentiel de l’ouvrage est composé de « Haïkou », forme poétique empruntée au Japon et qui comporte en principe 3 vers de 5, 7 et 5 syllabes. Quelques-uns des poèmes de « Deçà-Delà » adoptent la forme d’un haïkaï redoublé dont le sixième vers est cependant différent du troisième. On peut imaginer que l’habitude japonaise de réciter un haïkaï deux fois, l’une après l’autre, a donné à LHOMIER l’idée de cette création personnelle.


En toute logique on peut conjecturer que ce jeune auteur de 20 ans a préalablement dû s’essayer à d’autres formes poétiques avant que de se lancer dans « l’aventure » alors toute nouvelle du Haïkaï. Mais, là aussi, il nous est impossible de vérifier notre hypothèse.


Il nous paraît très  probable que son intérêt  pour le haïkaï dût être éveillée par la lecture des haïkou parus dans le numéro de la Nouvelle Revue Française de septembre 1920 (ouvrage à consulter sur ce point : « Travaux de Littérature » publié par l’ADIREL avec le concours du Centre National du Livre – « La Littérature française au croisement des cultures ». T.L.XXII. Colloque des 5 - 8 mars 2008 à l'Université Paris-Sorbonne-p.326. – DROZ-Genève. 2009. (Extraits sur Google Books : https://books.google.fr/books?id=XTH1tKrCd20C&pg=PA328&dq=Au+fil+de+l%27eau+Paul-Louis+Couchoud,,Andr%C3%A9+Faure,Albert+Poncin&hl=fr&sa=X&ei=6dCeVMvtDYT2UoSOgdgF&ved=0CD0Q6AEwAg#v=onepage&q=Au%20fil%20de%20l%27eau%20Paul-Louis%20Couchoud%2C%2CAndr%C3%A9%20Faure%2CAlbert%20Poncin&f=false).



Qu’en est-il de l’influence sur notre poète du peu diffusé recueil « Au fil de l’Eau » , de Paul-Louis Couchoud, André Faure et Albert Poncin, premier ouvrage de haïkou « français », paru en 1905 (consultable en partie sur Google books : https://books.google.fr/books?id=G0BYDyU0wYYC&pg=PT84&dq=Au+fil+de+l%27eau:+Les+premiers+ha%C3%AFku+fran%C3%A7ais+%281903-1922%29&hl=fr&sa=X&ei=XNCeVOf3Msn_ULSkgagL&ved=0CDAQ6AEwAA#v=onepage&q=Au%20fil%20de%20l%27eau%3A%20Les%20premiers%20ha%C3%AFku%20fran%C3%A7ais%20%281903-1922%29&f=false) ? Il est impossible de le dire.


Pour une approche de l’évolution et des possibilités de cette forme poétique, nous recommandons la lecture du remarquable ouvrage sur le poète Matsuo BASHÔ, grand maître de ce genre : » HAÏKAÏ-Matsuo BASHÔ et ses disciples, traduction française de Kuni MATSUO et Emile STEINILBER-OBERLIN, 1936  disponible en édition libre de droits. (Ebooks libres et gratuits http://fr.groups.yahoo.com/group/ebooksgratuits Adresse du site web du groupe : http://www.ebooksgratuits.com/).

                                                                              ***



Ci-dessous le texte le texte complet de: "Deçà-Delà":

 

 


Deçà-Delà.

Haïkou.

Bienfay LHOMIER.





  

Au Charme d’Or.
15, de la Tour des Dames. Paris. 9ème arr.
MCMXXII.




Flâneries.





                   Un if noir et droit
Contre le ciel qu’il accuse
D’un été trop froid.





Impression de nuit,
Pleine lune et quai désert,
Mon pas sonne clair.



 


Pavés écailleux
Perdus au fond d’un brouillard
Terne et merveilleux.




La Marne qui coule,
Toute en reflets de ciel gris,
Paisible sourit.

 


  
Ancienne guinguette,
Javas et valses musettes,
Aujourd’hui muette…




Clin d’œil à la Seine,
La pleine lune au pont Neuf :
Paris-mise en scène.




La Marne ou la Seine,
L’Escaut, la Meuse ou le Rhin
Qui roulent ma peine.




La nuit tout se tait
Dans la ville et le village :
Reposez en paix !

La nuit tout se tait
Dans la ville et le village :
Le passé renaît.



Les ors de l’automne
Dans le grand parc d’autrefois
Tremblent au vent froid.
Jardin du Luxembourg.







Les toits gris de plomb
Et dessus le crépuscule,
Rose et doux et long.
Paris d’autrefois I.








Claquement d’un fiacre
Qui martèle les pavés
D’un printemps rêvé.
Paris d’autrefois II.








Verrai-je la crue
Avec Saint-Lazare en l’île
Au miroir des rues.
Paris d’autrefois III. Souvenir de 1906.







Ce n’est qu’un reflet
Au bord d’un étang gelé
Un jour aigrelet.

Ce n’est qu’un reflet
Au bord d’un étang gelé
Où l’hiver se plaît.






Fine fleur de givre
Où le ciel bleu étincelle
Et ne peut survivre.




Un instant prêté
Au sourire du printemps
Mais en aparté.



Quand la lune froisse

La surface de l’étang,

Les grenouilles croassent.




Ciel gris et platanes

Dénudés sur l’avenue

Où boîte une canne ;



Ciel gris et platanes

Dénudés sur l’avenue

Où le jour se fane.





Tracasseries.






L’automne, l’ennui,
Au premier jour de l’hiver
On sait ce qui suit.

L’automne, l’ennui,
Au premier jour de l’hiver
Le gel déjà luit.




Oui, les malheureux,
L’hiver, Messieurs les nantis
Maigrissent un peu…




Quant aux grands discours
De Barrès et de Maurras,
Heureux sont les sourds…




C’est être léger
Que de croire au demi-tour
Qui peut tout changer.







Les mots, ces sottises,
Dont tous les politiciens
De tous temps nous grisent.




Ceux-là que j’enseigne
Que deviendront-ils demain ?
Des gueux qu’on dédaigne ?

Ceux-là que j’enseigne
Que deviendront-ils demain ?
Ces puissants qui règnent ?




Oui, ni Dieu, ni Maître,
N’en déplaise à tous les blancs ;
Surtout pas de Maistre !



Thiers, cruel nigaud,
On chantera la Commune
Malgré tes flingots.
A la Commune de Paris 1870.








Dimanche à la messe
Ou bien dimanche ou bistrot
Mais chacun s’empresse…



L’aube naît devant,
Le soir trépasse derrière :
L’usine, en tout temps.



C’est la liberté
Qu’on voit danser certains soirs
De peuple ameuté…




Douze heures durant
Et pour la même misère
Après comme avant.
Le Travail I.




Ce sont des usines,
Engrenages et turbines,
Et l’on n’y vit pas.
Le Travail II.




 
Un mot : prolétaire,
Partout la même « patrie » :
L’usine et la terre.
Camarades I.



Un mot : camarades
Et plus jamais, plus jamais,
Une aube maussade !
Camarades II.




Octobre de bruines,
L’ange sourit-il encore
Dessus Reims en ruines ?
Souvenirs d’un voyage dans l’est 1921 - I.



 
L’eau des entonnoirs

Regarde au ciel de Champagne

Descendre le soir.
Souvenirs d’un voyage dans l’est 1921 - II.





 
Tués à Craonne,

Devant Verdun, à Péronne,

Sur l’Aisne ou la Somme…
Litanies. Souvenirs d’un voyage dans l’est 1921 - III.


  
Moignons d’existence :
Estropiés ou sans visage
Des villes de France.
Gueules cassées.







Champs hachés de pierres,
De ferrailles ou d’acier
Et de cimetières.
Souvenirs d’un voyage dans l’est 1921 - IV.







Dans le ciel sonore
La mort boit à ma santé
Car je vis encore.
Le poilu. Souvenirs d’un voyage dans l’est 1921 - V.








Quel sens au mot « race » ?
Est-il un sens aux charniers
Qu’il laisse pour trace ?
Souvenirs d’un voyage dans l’est 1921 - VI.






 
Trois pierres d’église,

Une plaque d’émail bleu

Seule et désapprise…
Village Disparu. Souvenirs d’un voyage dans l’est 1921 - VII.




 

Gamineries.








 
La nuit tout à trac
Je revois danser nos jours
Tout au bord du lac.




 
Tout amour le sait :
Chaque vague chasse l’autre ;
Il meurt et renaît.





Un seul lit parfois
Mais toujours deux aventures
En ce même endroit.

Un seul lit parfois
Mais toujours deux aventures
Et la même croix.





Soupirs et caresses…
La nuit donne et la nuit prend,
L’aurore délaisse…





Pour s’aimer un quai,
Quand le printemps s’y promène,
Vaut mieux qu’un palais.








 
Pourquoi rêver tant ?
Tant vouloir si peu de choses
Et pleurer à cause ?
Des Femmes.






 

Ourlés de violine
Comme un ciel de crépuscule,
Vos yeux se devinent.




 
Frôlement, soupirs,
L’attente et la certitude,
Pointe du désir.






 
L’amour comme un fait
Et non l’espoir ou le rêve
Que l’aube défait.









Regard sans sourire
Sous la masse des cheveux ;
Un amour soucieux.
L’Etrangère I.










Un cliché hâté
Qui n’évoque pas l’amour
Mais sa nudité.

Un cliché hâté
Qui n’évoque pas l’amour
Mais le temps passé.
L’Etrangère II.







Cette nudité
Et ces yeux qui vous regardent
Pour quoi constater ?
L’Etrangère III.









Amour des moissons
Aux cheveux couleur de blé
Et taches de son…








Au goût de tes lèvres,
Du fond du ciel noir, qu’y puis-je
Si minuit s’enfièvre ?








Fin d’après-midi
Sous un soleil de décembre
Et nos reflets unis.









Pitreries.












Sans un mot serai-je
Fontaine gelée offrant
Sa vasque à la neige ?









Les jours seront gris
D’étain, d’opale ou de plomb,
Calmes tout au long.









Pourquoi ces veilles ?
Il naît ce qui ne meurt pas :
Démons et merveilles.










Tout ce que je suis
Se loge au bout d’une plume
Qui court ; le temps fuit.










La mort, changement
Ultime, une transition,
Un allègement.










Moi-même aujourd’hui
Comme devant l’étalage
D’un marchand de fruits,

Moi-même aujourd’hui
Comme devant l’étalage
De mes jours enfuis.














Un poète, moi ?
Non, un rémouleur de mots,
Un tambour : au choix.







Roses d’outremer,
Chères au cœur de Nerval,
Votre éclat se perd.

Roses d’outremer,
Chères au cœur de Nerval,
Ce siècle est de fer.








Que vaut la parole
Que l’on n’a pas mise en vers ?
Rien, elle s’envole.








Si moi je commence,
Mon père s’en va finir
De naître à l’absence.







J’enseigne des mots
Papillons, feuilles et fleurs
Et quelques couleurs.







Poète trop gourd
De style et d’inspiration,
Fais donc au plus court.





Ce lait sur le feu
Comme ta vie s’enfuit si
Tu le perds des yeux.






Auréole verte
Qui danse au fond des cafés
De « promesse » à « perte ».
L’Absinthe.







La neige en silence
Virevolte au bord des toits,
Souris et tais-toi.





Achevé d’imprimer le 13 février 1922 pour Le Charme d’Or.
Imprimerie Girardon.
2, impasse Girardon. Paris. 18ème arr.