mercredi 3 mai 2017

Galimatias de Saison.



(Parc du château de Rivau - Touraine.)


Au temps du dieu Protée[1],
Au vieux temps des chimères,
De la chèvre Amalthée[2]
Et de la Grande Mère[3],
Le vrai disait le faux
Et le faux plaisait tant
Que pour vrai par défaut
On l’acceptait content.
Les jours et les années
Et les dieux et les gens,
Les vérités données
Et les faux contingents
Sont aujourd’hui changés
Car le poids du trop vrai
Nous laisse envisager
Du mensonge l’attrait ;
Naïveté, faconde,
Ont un double visage
Du présent de ce monde
Au passé d’un autre âge
Et ce qu’on peut prouver
N’est pas ce que l’on croit
Quand ce qu’on veut rêver
Seul en puissance croît.

                               ***        


[1] Protée, mythologie grecque : divinité marine capable de se métamorphoser.
[2] Amalthée, mythologie grecque : chèvre qui allaita Zeus (Jupiter).
[3] Grande Mère : la déesse Mère ou déesse primordiale des cultes anciens.

Cassandre.



(Jardins du château de Villandry - Touraine.)

Cassandre qui passait par là
Se souvînt-elle d’une rose
Que, pour elle, Ronsard effeuilla
Mieux qu’on ne peut le faire en prose ?

Peut-être bien, peut-être pas ;
On peut en deviner la cause :
Cette fleur avait moins d’appas
Que celui qui, prenant la pose,
Marchait en lui donnant le bras.

Mais c’est ainsi que vont les choses
Et que pour nous le temps s’en va ;
Cassandre qui passait par là
Se souvînt-elle d’une rose ?

                               ***        

lundi 1 mai 2017

Rondeaux.



(Sully-sur-Loire.)   


J’ai fait des rondeaux amoureux,
Des citadins et des agrestes,
Des potagers, des bienheureux
Mais voyez le peu qu’il m’en reste :
J’ai fait des rondeaux amoureux.

Plus courts que des chansons de geste,
J’en ai donné de savoureux
Et quelques uns aussi de lestes,

Des rustres autant que des preux,
Des paresseux ou bien des prestes,
Des apaisés, des coléreux,
Et même encore, j’en atteste,
Des sommaires, des langoureux,
Des élégants, des indigestes,
Des brillants et des poussiéreux
Et n’ai, c’est assez manifeste,
Jamais été qu’un songe creux:
J’ai fait des rondeaux amoureux                              

                         ***


mardi 25 avril 2017

Faute de Roses.



(Jardins du château de Villandry - Touraine.)




Il n’est pas encore de rose
En ce froid début du printemps,
Puis-je vous offrir quelque chose
Ou de l’iris, que j’aime tant,
De la glycine ou du lilas
Du fond du jardin que voilà,
Car, vous en savez bien la cause,
Il n’est pas encore de rose.

Un bouquet vaut mieux qu’une glose,
D’autres vous en offriront tant.
Je vous offre les fleurs du temps,
Il n’est pas encore de rose
En ce froid début du printemps.

                               ***

vendredi 14 avril 2017

Le Vide.





Pour une fois,
J’ai la bourse moins vide que l’esprit
Ou tout au moins c’est là ce que je crois ;
Pour une fois.

C’est toujours l’un ou l’autre, étrange loi,
Je n’y puis rien, chacun l’a bien compris ;
Pour une fois,
J’ai la bourse moins vide que l’esprit.

Entendez-moi, rassurez-vous,
Cela ne fait pas encore beaucoup
Mais c’est toujours mieux qu’autrefois ;
Pour une fois !

                               ***

mercredi 12 avril 2017

Des Heures Incertaines.





Passent les jours et les semaines,
Chacun s’agite et chacun dit :
« Voici des heures incertaines ! »
Dimanche interroge lundi
Sans obtenir une réponse
Et nul ne sait ce qui l’attend.
La rose le cède à la ronce,
Que va nous donner ce printemps ?
L’issue en est bien indécise
Et plus encore la moisson :
Il souffle un grand vent de sottise ;
On rêve de dire « passons »
Et puis de se lever de table
Mais à ce genre de festin,
Quoiqu’on le trouve souhaitable,
On ne peut changer le destin.
Il faut boire jusqu’à la lie
La coupe qu’on a devant soi,
Ce qu’on nomme « vivre sa vie »
C’est souvent n’avoir pas le choix.

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