vendredi 28 août 2015

Contes et Légendes.






Les bois ombreux et les rochers
Gardent maintes vieilles légendes
De diables, de trésors cachés,
De lutins courant dans la brande.

Par la crête où souffle le vent
Sur l’ombre mauve des bruyères,
De vieux nains barbus et savants
Cherchent des gemmes sous la terre.

Quand naît la nuit sous les sapins,
Comme autrefois les trolls reviennent,
Dans les forêts les gobelins
Reprennent des guerres anciennes.

Dans les clairières à minuit
On voit encor danser des fées,
La Dame Blanche au bord d’un puits
Module une plainte étouffée,

Et l’on rencontre aux carrefours,
Les yeux luisants, l’Homme Sauvage,
Comme, plus souvent qu’à son tour,
Ce cavalier noir sans visage…

                       ***
 

mardi 25 août 2015

Dialogue.






« La ville est loin, le monde aussi,
L’horizon plus encore ;
Que faites-vous ici ? »

« Je voyage en suivant l’aurore,
L’amour qui me conduit
M’apaise et me dévore. »

« Hier à demain dit : aujourd’hui,
Quel est celui qui pêche
La lune au fond d’un puits ?

Que le Saint Enfant de la crèche
Veuille absoudre le fou ;
Que son obsession prêche. »

« Passez donc, que me voulez-vous ?
Et que chacun m’oublie
Que plus rien ne me lie ; 

Je suis parti, c’est tout."

                 ***

lundi 24 août 2015

Les Quatre Tours.






Elles sont quatre tours debout,
Derniers témoins de nos murailles,
Quatre toujours de fière taille,
Elles sont quatre tours debout.

… Dauphin, tes écorcheurs sont fous
   Qui rêvent ici de ripailles,
   Ils y feront festin de coups,
   De plomb, de pierre et de ferraille.
   A Hausbergen, sache-le, nous,
   Que l’évêque appelait « canaille »,
   Chevaliers autant que piétaille
   Nous leur avons rompu le cou
   Comme demain, et qu’il t’en chaille,
   Devant Nancy, je sais bien où,
   Ce seront les Suisses et nous
   Qui remporteront la bataille…

Qui du temps autant que de tout,
Toujours aussi fières se raillent,
Elles sont quatre tours debout,
Derniers témoins de nos murailles.

                           ***
 

dimanche 23 août 2015

Les Amants de Venise.






Voilà Venise un soir d’hiver
Où vont les ombres de nos ombres
A l’heure où la brume de mer
Efface les traits et les nombres.

Dans l’eau noire des canaux luit,
De çà, de là, quelque lanterne,
Une sentinelle des nuits
Au pied d’un campanile terne.

Place Saint-Marc, nous étions deux,
Reflet double aux dalles luisantes
D’un froid humide et ténébreux,
Deux silhouettes complaisantes,

Deux personnages regrettés,
Ni Othello, ni Desdémone,
Pour ce jeu jamais raconté
D’une illusion que j’abandonne.

Vous errerez l’éternité,
Soupirant où d’autres soupirent,
Amours vivant d’obscurité
Dont chaque nuit le mal empire.

C’était un soir de février
J’inventais en marchant les stances
D’un amour à venir au pied
Des quatre étalons de Byzance…

                           ***

samedi 22 août 2015

Le Cycle des Amours Déçues. IX. Le Jeu d'Echecs.






Mes vers disent le nom
D’une femme étrangère,
Transfuge et passagère
Dont les « oui » disent « non ».

Ils disent l’aventure
Qui commence et finit
Et recommence ou ni
Rêves, ni faits ne durent.

Ils disent l’illusion
Et la déconvenue
En sa tristesse nue
De quelque amour passion.

Ils disent à la reine
D’un jeu d’échecs je crois,
Qu’un fou qui se crût roi
Ce soir quitte l’arène
Et qu’au matin trop froid
Il mourra de sa peine.

                  ***