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jeudi 16 avril 2020

L'amour de nos aînés.



(Carnaval de Bâle - 2008.)

Ce n'est pas à moi que leur mort est due !

Je les ai protégés, bien enfermés
A double tour, aussi loin de la vue,
De l’aide et de l’amour de leurs aimés
Qu’il est possible et ma sollicitude
Les a privés, pour leur sécurité,
De tout contact. Dans cette solitude
Qu’il est hors de question de limiter
Parce que c’est la plus simple mesure,
J’en suis heureux, ils sont bien à l’abri !
Trois fois par jour, je vous rassure,
On leur porte à manger, ils sont nourris !
Ils peuvent échanger quelques paroles,
Juste un instant, avec un être humain,
Après, paisiblement, beaucoup somnolent
Et chaque jour ressemble au lendemain,
Leurs quatre murs comme seul paysage.
Et c’est très bien, rien ne vaut le repos
Et la tranquillité dans le grand âge.
Nous veillons et faisons tout ce qu’il faut.
Surtout pas de contacts ! Le téléphone
Si c’est possible, ah mais pas de courrier
Venu d’ailleurs ! Qu’ils se raisonnent,
C’est pour leur bien, surtout pas de papier !
Ils meurent malgré tout ? Allons ! Quand même ?
Oui, cher monsieur, ils nous quittent quand même,
Désespérés, douloureux et reclus,
N’ayant jamais revu ceux qui les aiment,
Pas même au cimetière, et c’est voulu…

Oui, d’accord, mais… leur mort ne m’est pas due !

                               ***

lundi 6 avril 2020

Avertissement.



(Strasbourg - Le monument aux morts de la Place de la République.)

En treize cent quarante-huit, la peste
Est si grave que par endroit ne reste
Qu’un habitant sur deux et parfois moins ;
Soyez heureux nous en sommes très loin.

Mais il ne tient qu’à vous qu’on y arrive :
Ce temps rappelle à ceux qui vivent
Aux jours présents que la Mort aime bien
Les sots qui ne tiennent compte de rien:
Regardez la qui rit de vous, bravaches !

Quand elle passe, heureux ceux qui se cachent.

                               ***

samedi 7 mars 2020

"Ce."




Cette résurrection d’une mémoire morte,
Jeunesse et renouveau de quel ancien charnier,
Il demeure, -et chez qui ? par qui donc réveillé ?-
Derrière une fenêtre ou derrière une porte,
Comme un fragment de nuit qu’on voudrait oublier.

Et qui sait donc où va ce qui vient de la sorte,
Affublé de ce nom qu’on n’ose publier,
Assassin cauteleux aux mille routes tortes,
Qui trouve le chemin du plus petit foyer
Comme du plus puissant et tous deux les emporte.

Pourquoi donc ce frisson que l’on voit s’associer
En cachette au discours de ceux qui nous exhortent ?
C’est que cet ennemi se moque des guerriers,
Il abat l’âme faible aussi bien que la forte.

Et pourquoi ce refus enfin de signifier
A tous que l’avenir n’a rien qui réconforte,
Pourquoi suivre leur rite et pourquoi m’y plier ?
Pourquoi ce petit mot sous ma plume si leste ?
« Ce », pour ne pas écrire à la place « la peste[1] » ?

                               ***       


[1] Au moyen-âge tout épisode épidémique, quel que soit son agent infectieux, est qualifié de « peste » (aujourd’hui ce terme est réservé à l’infection due à la bactérie Yersinia Pestis, agent de LA peste.)