dimanche 28 septembre 2014

Matin d'Automne.






Longues écharpes blanches
Aux bardanes des bords
Qui se prennent aux branches
Noires des arbres morts

Quand le jour naît parmi
La broussaille d'Automne
Aux longueurs monotones
D'un canal endormi,

Brillants lambeaux de soie
Que le soleil effrange
D'or et de sang étranges
Où le matin chatoie,

Habillez les chemins
Et les herbes des champs
Des perles que demain
Le froid fera diamants.

              ***



mercredi 17 septembre 2014

Une Vieille Dame.





C'est ici qu'habitait "un tel",
Sa veuve est morte l'an passé...
Elle s'arrête et songe au ciel;
Certains chemins sont tout tracés.

C'est toujours la même chapelle
Tout au bout de la même rue
Où ses habitudes l'appellent
Aux heures de longtemps prévues.

Mais c'est presque tout ce qui reste
Du quotidien qui l'a vu naître.
Sa démarche n'est pas bien leste
Et que de volets aux fenêtres...

Que de voisins qui sont partis,
Que de maisons sans héritiers,
Que d'enfants trop vite grandis,
Absents mais non pas oubliés...

Et que de soirs et que de nuits
A faire de la solitude,
Dans le silence qui vous suit,
Une si longue et terrible habitude.

                    ***

mercredi 3 septembre 2014

L'Etranger.







Il marchait comme on marche loin de chez soi,
Et plus qu’à la ville, étranger à lui-même
Comme on est par abus d’alcool quelquefois,
Après un cachet ou pour quelqu’un qu’on aime.

L’amour ? Pas vraiment, il marchait en colère,
S’il s’arrêtait on voyait ses mains trembler,
Il marchait tout comme un qui va aux galères,
Un qui a perdu ou bien qui a volé.

Et c’était un jour, un soir, un matin sombre,
Un grand carrefour, une rue ou un quai,
L’absence encore et partout, et toujours l’ombre,
Le chagrin, le désespoir peints sur ses traits.

Et il allait comme irait un étranger
Mais, aller : l’horreur, se résigner : le pire;
Alors ? Un pas de plus où rien ne l’attire
Et moins hésitant que plus découragé ?

                    ***

mardi 2 septembre 2014

Impossible.







L’automne d’un matin
                                Sur un plan d’eau perdu
Dans le dédale ancien
                                Et les chemins perclus
De ma mémoire.


Brouillards accumulés
                                Et reflets d’eau lointaine
Aux barques submergées
                                Dont la surface vaine
D’aube se moire.


Comment mettrais-je un nom
                                Sur telle résurgence
Plus qu’imprécise au fond
                                Et sur telle distance
Qu’on n’y peut croire ?


                         ***

mardi 19 août 2014

L'Immobilité.






Chemins boueux, routes d'ornières,
Je voyageais sans fin l'exil,
Le temps me couvrait de poussière,
Chacun disait: "où s'en va-t-il ?"

Un jour pourtant, quitte à surprendre,
Mes pas ont voulu s'arrêter;
N'ayant plus d'ailleurs où me rendre
Je me suis cru en liberté.

En voyant passer les nuages
Mon laisir s'est mis à chanter:
"Bon vent à tous ceux qui voyagent
Et vive l'immobilité !"

Hélas, le monde n'est pas sage,
Il n'a pas cessé de bouger
Tandis que je prenais de l'âge
Il poursuivait d'un pas léger.

Et me voici bien solitaire
Et me voici bien étonné,
Un peu comme un vieil antiquaire
Dans un village abandonné.

Les objets que je manipule
En souriant ne sont plus rien
Que des bibelots ridicules
Pour le rare passant qui vient.

Sans faire de littérature
Je suis aussi dépassé qu'eux
Et presque une caricature
De poète et de maître-queux

Avec mes vieilles casseroles,
Mon vieux porte-plume à la main;
Entre déjeuners et paroles
Je me dis: suis-je encore humain ?

              ***


lundi 18 août 2014

Les Livres en Liberté: Histoire d'une Adoption.





Sur les rayons de la cahute,
Là-bas, un livre m'appelait;
Le vent qui siffle et qui chahute
Raconte un peu ce qui lui plaît.

Mais le vent sait que je l'écoute
Comme je sais bien qu'il m'entend,
Si quelqu'un parmi vous en doute
Il n'aura qu'à faire semblant.

"Un livre vert comme les feuilles
Et qui parle de la forêt,
Va donc, il faut que tu l’accueilles
Et tu le liras sans regret."

Au matin gris, trois pas en ville
Pour trois courses d'à peu près rien,
Après passons à plus utile
Et venez avec moi mon chien.

Le jet d'eau chante solitaire,
Les bords de l'étang sont déserts,
Le temps a mauvais caractère,
Ce mois est un peu tête-en-l'air.

J'ai poussé jusqu'à la cabane,
Je me suis assis sur le banc:
Tous ces livres qui les condamne,
Qui vient ici les mettre au ban ?

Au vert franc de sa couverture
J'ai compris que j'étais devant,
J'étais plein de désinvolture,
Les arbres bruissaient dans le vent.

Je feuilletais à l'aventure,
Déjà nous étions plus qu'amis,
Il n'était pas de la nature
De ceux qu'on ne lit qu'à demi.

Ce livre, "la Forêt Perdue",
A cette heure-ci est chez moi
Où son histoire sera lue
Et même lue à haute voix.

              ***


jeudi 14 août 2014

Les Hirondelles.







Les couleurs du ciel ont changé
Mais où sont donc les hirondelles ?
Moi, je n’ai presque pas bougé,
Elles ont fui à tire-d’aile.

La crinière des marronniers
A force de pluie incessante
Sur les quais s’est mise à rouiller ;
Quelle fin d’été languissante !

Où sont les chaleurs de midi,
Les femmes en tenues légères,
Où sont les jardins engourdis
Dans leurs corolles de lumière ?

Gris des balcons et gris des toits,
Au ciel grisaille nouvelle,
Le vent qui chante quelquefois
A voix douce dit et rappelle :
Mais où sont donc les hirondelles ?

                    ***

lundi 11 août 2014

Jamais Plus.



La première fois un sourire
D'amour. Le même jamais plus...
Un livre et le bonheur de lire
Et une fois le livre lu,
Bien sûr, le même jamais plus.
Et puis cette étreinte voulue
Dans la flamme des corps,
La certitude dévolue
Aux hommes et comme la mort
Brève et la même jamais plus.

               ***




Et... un article sur un poète belge méconnu: Roger DE LEVAL:   

http://faititre.blogspot.fr/2014/08/poete-qui-ou-que-suis-je-propos-de.html




jeudi 31 juillet 2014

Etude d'un poème de Verlaine.



Un article sur le poème "Portrait Académique"(du recueil "Invectives" 1896) de Paul Verlaine.

http://faititre.blogspot.fr/2014/07/a-propos-du-poeme-portrait-academique.html






mardi 29 juillet 2014

Gris.



Pourquoi les printemps d'autrefois
Nous paraissent-ils des merveilles
Qu'un éclat de rire ensoleille
En ville, aux champs ou dans les bois ?

Couleur châtain, couleur de paille,
Tous les cheveux deviennent gris,
Il faut bien que le ciel grisaille
Puisque l'hiver en gris s'écrit.

C'est de soir gris que se colore
Ce que monologuent nos voix
Des gris ennuis qu'elles déplorent,
Des misères que chacun voit.

Gris, nos soucis si terre à terre,
D'une épitaphe à un sursis,
Grises nos heures solitaires
Mais toute vieillesse est ainsi.

             ***

Dans le Grenier.



Dans le grenier des âmes délaissées,
Venez, venez, nous cueillerons des fleurs
D'amours et d'illusions passées,
Dans le grenier des âmes délaissées.

Ici le rêve et les heures lassées,
La paix, ont choisi l'ombre pour couleur;
Dans le grenier des âmes délaissées,
Venez, venez, nous cueillerons des fleurs.




Ce triolet est composé à partir des deux vers d'un des "poèmes cathares" rapportés et traduits par M. Denis SAURAT: Nouvelle Revue Française, du 1er octobre 1953, 1ère année n°10, p.616-635.

mardi 22 juillet 2014