Voulez-vous connaître la nuit, la nuit
D’antan que nulle ville n’édulcore,
Voir les champs bleus sous la lune qui luit
Où l’enchanteur cueille la mandragore ?
Voulez-vous suivre le chemin d’argent
Qui tourne et tourne en rond jusqu’à l’aurore ?
Voulez-vous entendre au lointain du vent
Le chant triste et rempli d’amour encore
De la Belle à demi femme et serpent ?
Et voulez-vous apercevoir les fées
Effleurant à peine les gris arpents
D’un pré brillant de perles de rosée
Où court leur ronde légère et sans fin ?
Dites, voulez-vous connaître la nuit ?
Alors que l’on m’entende et qu’on se lève !
Venez, je ne suis pas un aigrefin,
Venez, ai-je l’air de n’être qu’un rêve ?
Bien sûr, il y a l’ogre et le géant,
Les feux-follets et puis l’Homme Sauvage,
Le calvaire…Et que pensiez-vous, céans,
Que vous puissiez rencontrer au passage
Sinon le silencieux cavalier noir
Qui vous prend toujours volontiers en croupe ?
Vous irez vite où ni matins ni soirs
Ne comptent plus : à la flamme, l’étoupe !
Allons, voulez-vous connaître la nuit ?
Mais non, mais non, pas la vôtre, la vraie,
Celle de l’ombre du meneur de loups,
La nuit de la chouette et de l’orfraie,
Celle d’ici, celle qui vaut dessous ?
Venez, venez, suivez la Dame Blanche
Et trouvez le trésor du souterrain
Mais avant l’aube ou gare à sa revanche :
Vous y mourrez de peine et de chagrin.
Alors, voulez-vous connaître la nuit ?
Acquiescez seulement, je vous conduis.
Nul ne répond. Faut-il bien que j'attende ?
J’ai beau me répéter, nul ne me suit ;
Se pourrait-il que pas un ne m’entende ?
Bon voici l’aube, il est temps, je m’enfuis.
Mettre une odeur de souffre à la demande…