mercredi 10 janvier 2018

Petite fable.




Je rencontre une souris
Qui se plaignait de disette,
La saluant d’un souris[1]
Je dis à la pauvre bête :
« Voyez, il en va pour moi
Tout comme pour vous, ma chère,
Mais à ceci près, je crois,
Qu’une croûte de gruyère
Est plus facile à trouver
Que le sujet d’un poème ;
J’en découpe à vous gaver
Si vous m’en soufflez le thème. »
Elle répond sans ambages :
« C’est notre conversation ! »
Je lui coupai son fromage
Et signai ma narration.

                               ***       


[1] Souris, subst. masc. : sourire (mot désuet).

mardi 9 janvier 2018

La terrasse.





Le soir tombe sur la terrasse
Comme un silence ensoleillé
Où de grandes ombres s’enlacent ;
Le soir tombe sur la terrasse.

Les fleurs sont des joyaux où passe
La beauté des jours oubliés ;
Le soir tombe sur la terrasse
Comme un silence ensoleillé.

                               ***        

lundi 8 janvier 2018

En souvenir de Gérard de Nerval.





L’inconsolé, le veuf[1], un beau soir me l’ont dit :
La folie fit le rêve et Nerval se pendit.
Les mots peuvent mener le meilleur à sa perte,
Ce sont de grands outils même en des mains expertes ;
Prends garde à la musique envoûtante des vers,
La chimère a des dents, la scène a son envers,
On voit en filigrane en l’amour des étoiles
La tombe que demain, en souriant, dévoile ;
Sur l’étrange chemin tant de roses l’ont dit :
La folie fit le rêve et Nerval se pendit.

                               ***                       


[1] « El desdichado » (Le Déshérité), l’un des sonnets les plus connus des Chimères de Gérard de Nerval commence par ces mots : « Je suis le ténébreux, le veuf, l’inconsolé… »